GabonOpinion

À toi, mon grand frère que j’admirais

c'est

Je t’écris aujourd’hui avec un poids sur le cœur et une brûlure dans l’âme. Toi, mon grand frère, ma grande sœur, toi qui étais un modèle d’intégrité, un phare pour ceux qui se noyaient dans les ténèbres de l’injustice, toi qui combattais avec la rage des justes, où es-tu ? Que reste-t-il de la flamme qui illuminait nos espoirs communs ?  

Je t’écris parce que je ne te reconnais plus. Parce que depuis que tu as goûté au pouvoir, tu es devenu ce que tu combattais avec tant de ferveur. Toi qui dénonçais les compromissions, les dérives, les silences complices, te voilà à ton tour complice par ton mutisme, par tes actes, par ton indifférence.  

Dis-moi, grand frère, comment dors-tu la nuit, quand ton VPM clame avec aplomb que « Dieu veut qu’on vote oui au référendum » ? Depuis quand invoque-t-on Dieu pour couvrir les jeux de dupes et justifier l’injustifiable ? Est-ce le même Dieu qui t’a donné cette colère sacrée pour défendre les opprimés ? Est-ce le même Dieu qui t’a enseigné que le pouvoir n’est pas un privilège mais un service ?  

Et toi, avec ton large sourire et ta danse si légère, célébrant un « oui » que tu aurais jadis combattu avec la même ferveur que celle qui faisait briller tes yeux autrefois. Te souviens-tu de ces jours où tu allais au Trocadéro, non pas pour applaudir, mais pour dénoncer les abus, pour réclamer le respect des libertés individuelles et la fin de pratiques injustes ? Te souviens-tu de tes discours, de tes engagements, de ce feu qui t’animait ?

Aujourd’hui, tu danses. Tu chantes. Tu appelles les gens à voter « oui », scandant que ceux qui osent s’y opposer sont contre les militaires, contre leur pays. Mais dis-moi, pourquoi avez-vous fait de ce référendum une guerre d’hommes, une guerre de clans ? Pourquoi avoir réduit un débat national à une bataille entre « pour » et « contre », entre loyauté aveugle et trahison supposée ?

Regarde-toi, grand frère. Prends une seconde pour te contempler dans le miroir de tes propres combats. Que dirais-tu à celui ou celle que tu es devenu si tu te rencontrais ? Quelle parole trouverais-tu pour justifier ce virage, cette trahison de ce que tu portais autrefois ?  

Je ne t’écris pas pour te haïr. Je ne t’écris pas pour te détester. Mais je t’écris pour te réveiller. Pour que tu te souviennes d’où tu viens, de ceux qui ont cru en toi, de ce que tu représentais. Parce que moi, je me souviens. Et si aujourd’hui je t’écris avec tant de violence, c’est parce que la déception d’un admirateur blessé fait plus mal que toutes les injures du monde.  

Reviens, grand frère. Rappelle-toi que le pouvoir est un manteau éphémère, et qu’il finit toujours par glisser. Rappelle-toi que l’Histoire ne ment pas, et qu’elle te jugera. Reviens avant que tu ne deviennes un monument de contradictions, un exemple de tout ce que tu combattais. Reviens, non pas pour moi, mais pour toi.  

Parce que si tu continues sur cette voie, il ne restera de toi que des mots creux et des danses hypocrites sur le Trocadéro de l’oubli. Et ça, je sais que tu ne le veux pas.  

Avec toute la douleur de celle qui croyait encore.  

Ta petite soeur déçue.

N'oubliez pas que vous avez vous aussi la possibilité de nous envoyer vos textes pour encourager, dénoncer et sensibiliser. Envoyez vos contributions à l'adresse ungabonaisnormal@proton.me. On publie en anonyme, sauf mention contraire, et nos messageries sont ouvertes au besoin.