Une chaîne nationale où le journalisme semblait souvent plier sous le poids des impératifs politiques, offrant une couverture monotone des actions du parti au pouvoir. Mais avec la transition politique en cours et les promesses d’une nouvelle ère, on aurait pu espérer un tournant décisif. Las, il semble que Gabon Télévision ait simplement changé de propriétaire sans changer ses habitudes. Si hier, les micros et les caméras vibraient au rythme du PDG, aujourd’hui, ils semblent s’accorder à une autre symphonie, celle de la glorification du régime en place. En 2024, dans un Gabon en quête de renouveau, on se demande si la première chaîne nationale n’est pas restée figée dans un schéma aussi ancien que contestable : celui de la propagande maquillée en information.
La propagande version 2.0 : même combat, nouvelle cible
Soyons clairs : personne ne conteste que le rôle d’une chaîne nationale inclut de relayer les actions gouvernementales. Mais quand ce rôle devient tout, quand il supplante l’investigation, l’équilibre des opinions et la diversité des sujets, une télévision publique perd son essence (les privées aussi hein, vous perdez de la crédibilité). Gabon Télévision semble coincée dans un mode de fonctionnement où les reportages se résument à glorifier les nouvelles initiatives, à couvrir les cérémonies officielles et à relayer les discours des leaders politiques, sans jamais interroger ni analyser. Et c’est bien dommage parce que des journalistes brillants ce n’est pas ce qui manque oh.
Les phrases toutes faites et les hommages dithyrambiques (l’enfant a fait l’école. Ça veut dire « excessivement élogieux ») s’accumulent, mais qu’en est-il de l’autre versant ? Celui des citoyens ordinaires, confrontés aux défis quotidiens de la vie au Gabon : le chômage des jeunes, les infrastructures défaillantes dans certaines régions, ou encore l’accès difficile aux soins et à l’éducation ? Ces réalités, bien que criantes, peinent à trouver leur place sur les écrans de Gabon Télévision. Ces problèmes se retrouvent maintenant sur les médias privés qui finissent souvent par être taxés de « médias d’opposition ». Kieeeeeeh.
Les Gabonais paient, mais pour quoi exactement ?
C’est là que le bât blesse. Chaque mois, les Gabonais contribuent à cette télévision par la redevance audiovisuelle. Un acte qui, en théorie, garantit l’existence d’un service public à leur service. Mais que reçoit-on en retour ? Des flashs d’informations qui répètent à l’infini des communiqués officiels, des émissions souvent dépourvues de profondeur, et un refus manifeste d’aborder les sujets qui dérangent.
On aurait pu comprendre cette approche sous un régime monolithique où la critique était vue comme une menace. Mais aujourd’hui, où sont les signes de ce changement tant annoncé ? Pourquoi la pauvreté persistante, la hausse du coût de la vie ou les conditions de travail précaires des enseignants ne font-ils pas l’objet de débats ouverts sur les plateaux de Gabon Télévision ? Pourquoi cette peur palpable d’aller au-delà des apparences ?
À l’heure où les réseaux sociaux prennent le relais de l’information et deviennent le lieu d’expression des frustrations populaires, Gabon Télévision continue de s’enliser dans un modèle dépassé. Une chaîne qui devrait être un miroir de la société dans toute sa diversité semble aujourd’hui n’en refléter qu’un fragment soigneusement sélectionné.
Cela ne veut pas dire qu’il n’y a rien à sauver. Les reportages qui mettent en lumière les rénovations d’infrastructures ou les actions sociales méritent leur place. Mais une télévision nationale ne peut se contenter de célébrer : elle doit aussi questionner, dénoncer, et surtout, donner la parole à ceux qu’on n’entend pas.
Tout n’est pas perdu. Gabon Télévision peut encore devenir la plateforme citoyenne que le pays mérite. Cela nécessite du courage éditorial, des journalistes indépendants et une ligne directrice qui comprend que l’information, pour être pertinente, doit être équilibrée.
En attendant, les Gabonais continuent de payer leur redevance. Ils espèrent qu’un jour, cette contribution financera une télévision qui leur parle et non une télévision qui leur impose une seule vérité. En 2024, l’excuse du « ce n’est pas le moment » n’a plus lieu d’être. Le moment, c’est maintenant.
Et si Gabon Télévision refuse de changer, peut-être faudra-t-il se demander si elle mérite encore d’être la première chaîne du pays. Après tout, dans une époque où les écrans pullulent, ce sont les contenus qui doivent faire la différence.