Mais ça, c’était avant. Avant que le vent tourne, avant que les bureaux climatisés, les véhicules de fonction et les indemnités confortables ne fassent leur apparition dans vos vies. Maintenant que vous êtes ministres, députés, conseillers et autres figures très occupées, vous avez découvert que 18 mois, c’est trop court pour changer les choses.
Ah bon ? Pourtant, hier encore, vous traitiez d’incompétents ceux qui demandaient du temps. Vous étiez les premiers à crier qu’ils dormaient sur leurs lauriers. Et maintenant que vous êtes assis sur ces mêmes fauteuils, vous voulez nous expliquer que la patience est une vertu ?
Vous croyez que parce que vos vies ont changé, les nôtres aussi ? Vous avez troqué la colère populaire pour la sagesse du pouvoir. Nous, on est toujours nguembé au pivot. Toujours dans le noir à cause des coupures, toujours en train de payer des factures exorbitantes pour des services inexistants, toujours à jongler entre l’inflation et la survie. Mais maintenant, c’est nous qui sommes trop pressés ?
Hier, c’était des promesses, aujourd’hui, c’est des sermons.
On vous voit. On vous entend. Vous avez changé de camp et maintenant vous vous érigez en donneurs de leçons. « Le peuple doit comprendre…« , « Les réformes prennent du temps…« , « Il faut être patients…«
Vous qui, hier, nous promettiez la lune avec des tableaux chiffrés et des formules magiques, voilà que vous nous demandez maintenant d’attendre. Donc finalement, tout ce que vous racontiez avant, c’était du vent ? Du marketing pour votre carrière ?
C’est drôle comme le temps transforme les révolutionnaires en bureaucrates. Vous êtes passés de « On ne peut plus tolérer ça ! » à « Soyez raisonnables » en un claquement de doigts.
Et le plus cocasse, c’est qu’en plus de nous demander d’être compréhensifs, vous commencez à nous gronder. À nous faire la morale, comme si nous étions des enfants capricieux. Comme si nous n’avions pas le droit d’exiger ce que vous-mêmes réclamiez il n’y a pas si longtemps.
Mais la réalité, c’est que votre seul problème aujourd’hui, c’est que vous êtes de l’autre côté du mur.
Les retournements de veste sont devenus un sport national.
Regardons un peu ceux qu’on a enlevés du jeu. Certains, hier, étaient des monstres à abattre. Aujourd’hui, ils sont les premiers à nous donner des leçons de gouvernance et à jouer les analystes politiques de comptoir. Ah, donc maintenant, vous avez des conseils à donner ?
D’autres, qui crachaient sur le système, qui juraient qu’ils ne feraient jamais de compromis, sont aujourd’hui les premiers à quémander un strapontin. Ceux-là sont devenus des carpettes vivantes, prêts à tout pour se faire remarquer.
Et puis il y a les plus zélés. Ceux qui lancent des pétitions pour exiger que le général se présente en 2025, comme si leur vie dépendait de sa candidature. Pourtant, lorsqu’il s’est agi de signer une pétition pour exiger des comptes à la SEEG sur les coupures d’électricité, silence radio.
Le peuple qui souffre ? Ça, ce n’est pas leur combat. Leur seul souci, c’est de rester à proximité du pouvoir, de s’accrocher aux basques du chef, peu importe ce qu’il fait ou ne fait pas.
Voilà les perfides trompeurs dont parle la Concorde.
Des lions déguisés en moutons, des loups qui hurlent avec la meute quand ça les arrange et qui se font passer pour des agneaux dès qu’ils ont quelque chose à perdre. Des sorciers qui jurent vouloir le bien du peuple, mais qui ne pensent qu’à leur propre sort.
Ne vous méprenez pas : ce texte ne s’adresse pas à ceux qui travaillent vraiment, à ceux qui tentent, malgré les obstacles, de changer les choses. Il vise ceux qui ont retourné leur veste si vite qu’ils en ont attrapé le tournis.
Ceux qui ont oublié d’où ils viennent, qui nous regardent maintenant de haut, et qui osent nous dire que nous sommes trop impatients.
Alors un conseil : respirez un bon coup, regardez-vous dans un miroir, et demandez-vous si vous n’êtes pas devenus exactement ce que vous dénonciez hier. La réponse c’est oui hein, ne faites pas genre vous voulez vous remettre en question, vous savez au fond de vous que même vous regarder dans la glace est devenu insoutenable.