Mais qu’importe ! Dans leur tête, ils étaient désormais les rois du festin.
« Nous étions au banquet des puissants ! Nous avons mangé à la table du Lion ! » criaient-ils à qui voulait bien les écouter — et surtout à ceux qui n’avaient pas été invités.
Ils avaient tellement bien menti à eux-mêmes qu’ils en avaient oublié qu’ils n’étaient que des rats. Plus aucun ne rampait, non… désormais, ils paradaient ! Un reste de feuille de bananier sur le dos, un bout de ficelle autour du cou, et hop ! Les voilà transformés en chefs d’apparat.
Ils croisèrent un groupe de gazelles, fatiguées mais dignes, toujours en quête de liberté et de justice dans cette savane déséquilibrée.
Les rats, le museau en l’air, les toisaient du regard.
« Vos cornes ne sont pas assez affûtées pour diriger la savane, mesdemoiselles… » lâcha l’un d’eux avec un sourire narquois.
Un autre renchérit : « Le pouvoir se mange avec les dents, pas avec des rêves. »
Les gazelles, surprises, clignèrent des yeux. Elles, qui avaient toujours évité les rats pour éviter les puces, voyaient désormais ces mêmes créatures se donner des airs de rois.
L’une d’elles, plus vive que les autres, s’approcha et dit calmement :
« Mais vous… avez-vous seulement des cornes ? Ou même une colonne vertébrale ? »
Le silence fut long. Même le vent sembla retenir son souffle.
Un vieux caméléon, qui observait la scène depuis une branche, hocha la tête lentement et murmura :
« Il y a ceux qui mangent dans l’ombre, et ceux qui brillent de leur propre lumière. Les rats croient qu’en léchant la sauce, ils deviennent cuisiniers. »
Les gazelles s’éloignèrent, le cœur un peu plus lourd mais l’esprit clair.
Quant aux rats, ils se mirent à répéter cette phrase étrange :
« Nous étions au banquet, nous étions au banquet… »
Mais à force de le répéter, ils finirent par croire que c’était eux qui l’avaient organisé.
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