Et pendant ce temps, les travailleurs – souvent mal informés, souvent apeurés – acceptent les miettes qu’on leur tend. Pourquoi ? Parce que la peur est devenue une norme. Et que dans ce pays, la lâcheté s’exprime en une phrase devenue presque proverbiale : « On va encore faire comment ? »
Les employeurs, eux, s’en donnent à cœur joie. Faux bulletins de paie, manipulation d’horaires, magouilles administratives, intimidations en coulisses. Certains vont jusqu’à falsifier les fiches de salaires, font du trafic d’influence leur sport favori, mentent, trompent, et se croient au-dessus des lois. Intouchables. Inatteignables. Et toujours confortablement enrichis, pendant que leurs employés – ou devrions-nous dire leurs “employés-esclaves” – s’enfoncent dans la précarité.
Ce qu’on observe dans beaucoup d’entreprises au Gabon, c’est un enrichissement illicite masqué sous des titres ronflants de “direction”, “management”, ou “performance”. Une dynamique toxique qui empêche les Gabonais de vivre dignement, de s’occuper de leurs familles, de faire face à leurs responsabilités. Travailler, oui. Mais à quel prix ?
Alors il faut poser la question qui fâche : les travailleurs se sont-ils habitués à leurs chaînes ? Ont-ils fini par accepter l’inacceptable comme un destin ? Car tant que les autorités compétentes ne se pencheront pas, sincèrement et rigoureusement, sur cette réalité ; tant que les inspections du travail ne joueront pas leur rôle ; tant que les syndicalistes ne chercheront pas à entendre les deux versions – celle des employeurs et celle des employés – pour faire la lumière sur les abus, rien ne changera. On continuera à se souhaiter « bonne fête du travail » dans l’hypocrisie.
Alors oui : bonne fête du travail.
Mais surtout, fais ton travail.