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Rêves brisés, talents exilés : quand le Gabon oublie ses enfants

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Il y a des histoires qu’on n’écrit pas dans les livres, mais qu’on porte en silence dans les regards fatigués. Celle d’un juriste devenu journaliste, d’un étudiant devenu vigile. D’un ingénieur devenu livreur. D’un médecin devenu vendeur ambulant. Pas par manque de compétence. Mais parce qu’un jour, le pays qu’ils aimaient leur a gentiment demandé de rentrer… sans jamais vraiment les accueillir.

On les appelle la “diaspora”, comme si ce mot suffisait à justifier l’exil. Des jeunes, brillants, formés dans les meilleures universités, qui rentrent chez eux pleins d’espoir, les bras chargés de projets, le cœur gonflé de patriotisme. Et qui trouvent… des portes closes. Pas de postes. Pas de soutien. Pas même une chaise où s’asseoir pour expliquer ce qu’ils peuvent apporter.

Alors ils font ce que beaucoup font dans le silence : ils se “cherchent“. Ils acceptent ce qu’ils trouvent. Ils deviennent multitâches dans un pays où la survie est un sport de haut niveau. Parce qu’au-delà du diplôme, il faut affronter les coupures d’électricité qui paralysent les idées, les délestages d’eau qui sapent la dignité, les routes défoncées qui cassent les reins et les espoirs. Et puis il y a les taxes… imposées même aux rêves en gestation.

Il y a une violence invisible dans tout cela. Une violence qui fait qu’un pharmacien gère aujourd’hui une buvette. Qu’un enseignant brillant conduit un taxi pour nourrir sa famille. Et pendant qu’il fait ça, il prend peut-être la place d’un autre, quelqu’un qui aurait pu faire ce métier avec fierté, mais qui lui non plus, n’a pas eu le choix.

Il faut en parler. Parce que derrière chaque reconversion imposée, il y a un sacrifice. Derrière chaque talent parti, un vide. Derrière chaque retour manqué, un pays qui perd une chance de se reconstruire.

On ne généralise pas. Il y a des réussites, oui. Des jeunes qui entreprennent, qui innovent, qui changent les choses à leur échelle. Mais même eux, ils rament. Ils rament à contre-courant dans un pays qui ne leur tend pas la rame.

Ce n’est pas une plainte, c’est un cri. Un cri de ceux qui aiment ce pays, mais qui se sentent étrangers chez eux. Un cri de ceux qui veulent juste exister sans s’excuser d’avoir rêvé.

Il est temps de remettre l’église au centre du village. De cesser de demander aux jeunes de rentrer si c’est pour les laisser s’écraser contre les murs de la réalité. Il ne suffit pas d’aimer le Gabon. Il faut aussi que le Gabon aime ses enfants.

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