Un jour, parmi elles, se levèrent de jeunes antilopes, fougueuses et pleines d’espoir. Elles parlèrent haut et fort, dénoncèrent les injustices et promirent qu’une fois le Lion chassé, la savane ne serait plus un lieu de peur mais un royaume de justice.
Les autres antilopes crurent en elles. Elles leur donnèrent leur confiance, leur courage et même leur voix, les poussant au sommet du rocher des chefs.
Et le vieux Lion tomba.
Mais à peine installées sur les hauteurs, ces jeunes antilopes changèrent. Leurs regards devinrent fuyants, leurs discours plus distants. Elles qui hier encore marchaient parmi leurs sœurs, ne daignaient même plus les voir.
Pire encore, elles s’entourèrent des hyènes qui hier les effrayaient tant. Elles festoyaient à leurs côtés, riaient avec elles, partageaient leur gibier.
Et lorsqu’une antilope osa leur rappeler leurs promesses, on l’accusa d’être naïve, de ne rien comprendre aux lois de la savane. On la tourna en dérision.
— Regardez ces folles, ricanaient-elles depuis leur trône. Elles croient encore à la loyauté en politique !
Mais dans l’ombre des hautes herbes, les antilopes observaient. Elles n’étaient ni folles ni aveugles.
Elles voyaient bien que celles qu’elles avaient portées au sommet n’étaient plus des leurs. Elles n’étaient plus que des roitelets assis sur un pouvoir prêt à dévorer les leurs au moindre mot de travers.
Alors, les antilopes murmurèrent entre elles :
— Nous les combattrons, tout comme nous avons combattu le vieux Lion.
Mais à une différence près : nous ne nous laisserons pas corrompre. Nous ne nous perdrons pas comme elles l’ont fait. Nous ne trahirons pas notre combat.
Et tandis que les hyènes et les nouvelles reines de la savane festoyaient sous la lueur de la lune, dans l’ombre, les antilopes se préparaient déjà.
Car une chose était sûre : rien ne dure éternellement dans la savane.