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L’UDB s’impose, la démocratie vacille

Une Assemblée nationale presque monochrome s’est dessinée au fil des derniers mois.
Pas qu’il y ait un parti unique, mais toutes les couleurs se sont fondues dans la même teinte dominante : celle de l’UDB.
Les oppositions d’hier ont troqué leur singularité contre une proximité assumée avec le pouvoir. Résultat : une démocratie d’union qui ressemble de plus en plus à une démocratie d’unanimité.

Il serait bien naïf de ne pas l’avoir vu venir.
Dès le référendum, certains activistes et opposants avaient déjà révélé leurs véritables priorités : préserver leurs positions plutôt que défendre le peuple.
En acceptant — voire en réclamant — une Constitution qui concentrait les pouvoirs entre les mains du président, ils ont eux-mêmes préparé le terrain pour ce qu’ils dénoncent aujourd’hui.
Au fond, ils ont simplement été cohérents : ils ont façonné leur propre champion et cherchent désormais à figurer dans son premier cercle.
Un siège de député, après tout, offre la visibilité nécessaire pour espérer une place au Gouvernement.

Depuis le 30 août 2023, la scène politique gabonaise s’est peu à peu aplatie.
Les partis qui criaient au changement s’enrôlent aujourd’hui dans la même armée politique, au nom de la stabilité ou du réalisme.
À peine deux ou trois irréductibles tentent encore de faire vivre l’esprit d’opposition, comme des bougies dans un amphithéâtre trop éclairé.

Car Oligui, tout le monde le veut.
Il est devenu ce père symbolique que chaque formation s’attribue, parfois de force, pour mieux légitimer sa propre existence.
On ne parle plus d’alliances idéologiques, mais de filiation politique.
Et quand tout le monde appelle le même homme « père », il ne reste plus beaucoup de place pour la contradiction.

La réponse du Secrétaire général de l’UDB a d’ailleurs été sans détour :

« Oligui n’a pas d’autre enfant que l’UDB. »

Une phrase révélatrice.
L’UDB ne partage plus le pouvoir : elle partage le père.
Et cette confusion des rôles, entre autorité morale et domination politique, risque de marquer durablement la démocratie post-Bongo, qui devait se reconstruire, mais qui semble déjà se recentrer — sur un seul nom, un seul visage, un seul récit.

Alors comment jouer au jeu démocratique dans un environnement où un seul parti polarise, oriente et décide de tout ?
Comment parler d’équilibre quand le désordre lui-même semble orchestré, quand les élections deviennent des chorégraphies de chaos au service d’une continuité politique déguisée ?

La vraie question, au fond, n’est peut-être plus de savoir qui gouverne, mais qui ose encore contester.

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On nous avait promis la rigueur, on récolte le désordre

On nous avait promis une rigueur militaire, une nouvelle ère où tout serait carré, transparent, exemplaire. Et pourtant, tout ce qu’on récolte aujourd’hui, c’est du désordre. Les dernières élections législatives et locales au Gabon viennent de s’achever, et tout le monde — même le gouvernement, à travers les aveux à demi-mot du ministre de l’Intérieur — sait à quel point le chaos a régné.

Quand trois anciens Premiers ministres, dont Raymond Ndong Sima, celui-là même de la Transition, sont obligés de réagir, c’est qu’on a touché le fond.

Ce qu’on a vu, c’est la fraude à tous les niveaux. À croire que la Transition n’a servi à rien du tout.
Bourrages d’urnes, transhumance électorale – les vieilles recettes de la tricherie sont toujours d’actualité. Des gens quittent Libreville pour aller voter dans des communes où ils ne vivent pas, où ils ne connaissent plus personne. Oui, ils en sont originaires, mais qu’est-ce qu’ils savent encore de la vie là-bas ? Rien. Ils se déplacent parce que le parti leur dit de le faire, et personne ne contrôle rien.
Les assesseurs ? Formés dans le tas, sans expérience.
Les opposants ? Souvent sans représentants.
Les PV ? Ne concordent pas.
Et malgré tout ça, on nous demande de faire avec.

Mais qu’est-ce qu’on apprend aux Gabonais dans ces conditions ? Qu’il suffit de tricher pour s’en sortir. Que l’essentiel, ce n’est pas la justice, mais le résultat, si médiocre soit il. On perpétue les mêmes mauvaises habitudes : ce “petit 9,50 qu’on transforme en 10”, juste pour dire qu’on a réussi. Aujourd’hui, des candidats qui ne méritent pas d’être élus se retrouvent propulsés dans des fonctions comme s’ils l’avaient été par la volonté du peuple.

Ce gouvernement qui nous promettait monts et merveilles sur tous les sujets se révèle tout simplement incompétent.
Et s’il fallait une preuve, ces élections en sont une.
Si les diplômes n’ont pas sauvé le Gabon, il faut reconnaître que l’absence de compétence ne fait pas mieux, parfois même pire. Il faudrait avoir l’honnêteté de le dire.

Je ne dis pas que je regrette le PDG. Je ne le regrette pas.
Mais ce qui se passe aujourd’hui n’est pas mieux.
La seule raison pour laquelle les gens se taisent, c’est la peur — peur de perdre leur poste, peur de déplaire, peur de dire la vérité. Comme avant, sauf qu’aujourd’hui c’est encore pire : avant, on connaissait le chef. Aujourd’hui, on ne le connaît pas. Il est imprévisible, inaccessible. Alors on se terre, on se tait, on observe.

Ce n’est pas une avancée.
C’est un recul.

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Raymond Ndong Sima ou l’art de se laver les mains

Premier Ministre sous Ali Bongo, candidat déçu en 2016 qui avait validé l’investiture d’Ali Bongo, Premier Ministre durant la Transition… Le CV de Raymond Ndong Sima est une œuvre d’art. Une fresque politique qui aurait de quoi inspirer le respect, si ce n’était les présidents qu’il a servis.

Car à écouter son dernier message sur Facebook, on croirait presque qu’il a toujours été du côté des victimes d’un système qu’il décrit aujourd’hui comme frauduleux et dévoyé.

Il écrit noir sur blanc :

« On est bien obligé de constater qu’on n’a pas changé de logiciel. On est dans la continuité du système qu’on était supposé avoir écarté pour le bien de tous. »

Un constat sévère, qui sonne juste. Mais ironie du sort : ce « logiciel » qu’il fustige maintenant, il en a été l’un des administrateurs. Non seulement il a tourné avec, mais il a validé ses mises à jour. Ce système, il l’a vu de l’intérieur, il l’a pratiqué, il l’a cautionné. Alors aujourd’hui, quand il se présente comme le lanceur d’alerte revenu de tout, on ne peut s’empêcher de voir l’art du grand écart : dénoncer ce qu’on a contribué à installer.

À force de dénoncer les errements des autres, Ndong Sima se lave les mains. Mais ses mains sont celles d’un ancien chef de gouvernement, d’un homme qui a piloté la machine, qui a profité de son moteur tant qu’il roulait dans sa direction. Le voir aujourd’hui expliquer que tout cela n’était pas bon pour le pays, c’est comme entendre un ancien cuisinier dire que la recette était empoisonnée… après l’avoir servie des années durant.

Alors oui, retour à la case départ, comme il le dit. Mais il faudrait rappeler que lors de la partie précédente, Ndong Sima n’était pas spectateur : il était assis à la table, avec les dés dans ses mains.

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Législatives\Locales 2025 : Nouveaux visages, nouvelles méthodes

Si le nom d’Haresse Kengue est aujourd’hui sur toutes les lèvres, c’est bien la preuve qu’il existe une jeunesse qui tente de se bouger. Une jeunesse qui n’a pas les mêmes codes que ceux des politiques que l’on connaît. Pour le mieux ? Ça reste à débattre.

Belle, capricieuse, vulgaire, préoccupée… Les adjectifs fusent, tantôt positifs tantôt négatifs. Un rappel qu’on ne la connaît pas encore assez, mais qu’elle sait alimenter les conversations — par une qualité ou par un défaut. Mais pourquoi en parle-t-on autant, au fond ?

Se démarquer de l’existant

La candidature d’Haresse Kengue s’est imposée avec une promptitude étonnante. Pas seulement grâce à sa jeunesse, mais aussi par le jeu de l’identification. Haresse ne ressemble peut-être pas aux politiques habituels, mais elle ressemble aux personnes qu’elle veut représenter. Et c’est sans doute là que se joue sa différence.

Une détermination forgée dans l’ombre

On a ici une jeune Gabonaise déterminée qui n’a pas peur de la honte et qui porte des projets pour les siens. Des projets qu’elle a commencés dans l’anonymat, à travers une vie associative sans éclats de projecteurs mais riche en résultats. Bien au contraire, la fondatrice de l’Association des jeunes filles mères a montré qu’on pouvait exister sans attendre la bénédiction de l’État : en tissant des partenariats, en mobilisant des énergies, en améliorant concrètement le quotidien de sa communauté.

Le fond, oui… la forme

Ce n’est donc pas sur le fond que Dame Kengue est le plus souvent moquée, mais sur la forme. À cause d’un ton terre-à-terre, pourtant typiquement gabonais, et dont ne se prive pas le Président lui-même. On pourrait mettre sa phrase sur les maçons à côté du fameux « l’huile, c’est l’huile » sans savoir qui en est l’auteur. Mais voilà : pour l’un, c’est du « langage proche du peuple », et pour l’autre, un manque de savoir-vivre.

Peut-être n’est-ce finalement qu’une façon de discréditer ce qu’elle propose. Car au-delà de ses formes peu conventionnelles, Haresse Kengue porte des idées neuves, intéressantes et adaptées à son environnement. Et c’est bien ce qui dérange.

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Voter pour quoi, pour qui, et surtout pourquoi ?

On nous demande de voter. Mieux : on nous demande de voter pour la rupture. De choisir un nouveau chemin. D’éviter les caméléons en costume-cravate, de refuser les « tee-shirts politiques » fraîchement changés. On nous parle de mémoire collective, de lucidité. Et on a raison.

Mais moi j’ai une question. Simple. Crue.

Qui, au Gabon, vote vraiment par conviction ?

Pas dans les discours. Pas sur Facebook. Dans les urnes. Quand le moment vient.

Le vote de la famille, le vote de la peur, le vote de la faim

Tu crois qu’on vote parce qu’on a été convaincus par un programme, une vision, une cohérence politique ? Il faut aller à Nkembo, à Cocotiers, à Kinguélé, à PK12, à Bitam ou à Mitzic, et poser la question.

On vote parce que c’est la famille.
Parce que tonton a dit. Parce que le cousin menace.
Regarde Guy Nzouba Ndama. Il ne s’en cache même pas : « Si vous ne rejoignez pas mon parti, vous serez exclus. » On en rit jaune. C’est grotesque, c’est tragique, et c’est notre quotidien politique.

On vote aussi pour ne pas perdre.
Pas perdre les petits privilèges. Pas perdre la fête.
On vote pour le favori. Celui qui gagne. Celui qui fera couler la régab et la musique après les résultats.

Et surtout…

On vote pour manger.
Pour ce sac de riz. Pour ces 10.000 francs. Pour le t-shirt. Pour le transport payé.
On vote pour celui qui soulage maintenant, même s’il écrase demain.

Parce que quand on a faim, on n’a pas le temps pour les concepts.

Et l’opposition ?

Pendant ce temps, que fait l’opposition ?
Elle moralise. Elle dénonce. Elle promet la lumière. Mais elle ne rassure pas.

Comment veux-tu que le peuple donne sa voix à des gens dont il a vu les collègues se précipiter vers la soupe sitôt le pouvoir tombé ?
Comment veux-tu qu’il y croie encore, alors que les anciens combattants de la liberté sont aujourd’hui les bras armés des déguerpissements ?
Oui, parlons-en. Parce qu’un gouvernement de la Ve République a jeté des pauvres dehors.
Pas des trafiquants. Pas des mafieux. Des familles. Des enfants.
Et ce jour-là, beaucoup ont compris que le pouvoir, même avec une autre étiquette, reste le pouvoir.

Alors on fait quoi ?

On ne peut pas demander à un peuple de voter « bien », si on ne répond pas à ses besoins ici et maintenant.
On ne peut pas lui demander de voter contre le riz, s’il ne sait pas comment il va manger demain.
On ne peut pas lui dire « la rupture », sans lui expliquer comment il va traverser cette rupture.

Si on veut qu’il vote autrement, il faut d’abord l’écouter autrement.
Il faut lui parler vrai. Il faut lui montrer, pas seulement promettre.

Parce que la vérité est là : plus le peuple a faim, plus il est achetable.
Pas parce qu’il est bête. Mais parce qu’il est vivant. Parce qu’il a des enfants à nourrir. Parce qu’il souffre.

La dignité ne se mange pas, mais elle s’apprend

Ce texte n’est pas une excuse pour vendre son vote. Ce n’est pas une justification.
C’est une alerte.

Si vous voulez des votes sincères, construisez une politique sincère.
Montrez la cohérence. Montrez la constance. Montrez l’intégrité.
Et surtout, répondez aux besoins du peuple, même modestement, mais réellement.

Parce qu’à force de dire « votez pour la vision », pendant qu’un autre dit « votez pour 10.000 francs et un sac de riz », on sait déjà qui repartira avec la victoire.

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Changer de tee-shirt ne fait pas de vous un homme nouveau

À chaque élection, c’est la même rengaine. Les visages changent peu, les slogans se recyclent, et les bourreaux d’hier se réinventent en sauveurs d’aujourd’hui. Le plus troublant ? Ils comptent sur notre amnésie pour réussir leur tour de passe-passe.

« Ils n’ont pas changé. Ils ont juste changé de tee-shirt politique. »
— Harold Leckat

À chaque élection, c’est la même rengaine. Les visages changent peu, les slogans se recyclent, et les bourreaux d’hier se réinventent en sauveurs d’aujourd’hui. Le plus troublant ? Ils comptent sur notre amnésie pour réussir leur tour de passe-passe.

Harold Leckat, avec une lucidité qu’on aimerait contagieuse, refuse de laisser ce manège tourner en rond. Dans une tribune puissante publiée sur Facebook, il sonne l’alarme : l’inclusivité ne doit pas servir de blanchisserie politique. On ne reconstruit pas un pays avec ceux qui l’ont démoli. On ne bâtit pas la rupture avec ceux qui ont chanté l’ancien refrain jusqu’à la dernière note.

La mémoire est une arme

Depuis le 30 août 2023, date du putsch qui a renversé Ali Bongo, les espoirs étaient permis. Le peuple s’est levé, le peuple a cru. Mais à moins de deux ans de ce sursaut collectif, les caméléons de la République reprennent place sur l’échiquier. Les anciens ministres, députés et flatteurs du régime déchu s’offrent une nouvelle virginité politique grâce à une transition trop clémente.

Ils s’affichent désormais dans les meetings du changement, parfois même en tête de cortège, comme s’ils n’avaient jamais trempé dans l’injustice, le clientélisme ou la confiscation de la démocratie.

« Ce jour-là, nous avons cru en un essor vers la félicité.
Mais si nous laissons les néo-bâtisseurs repeindre en blanc leur passé,
ce jour ne sera plus qu’une illusion d’optique. »

Le bulletin est une arme. Servez-vous-en.

Ce n’est pas une parole en l’air. Ce n’est pas une menace. C’est un rappel simple : le pouvoir change de mains quand les citoyens prennent leurs responsabilités. Voter n’est pas une formalité. C’est un acte de mémoire.

  • Se souvenir de ceux qui ont défendu les urnes trafiquées.
  • Se souvenir de ceux qui applaudissaient la restriction des libertés.
  • Se souvenir de ceux qui festoyaient pendant que le peuple avait faim.

Le bulletin de vote n’est pas qu’un choix : c’est une vengeance douce, légale, démocratique.

Pas de pardon sans vérité. Pas d’unité sans justice.

Personne ne nie la nécessité de reconstruire ensemble. Mais ensemble ne signifie pas indistinctement. L’unité nationale n’a jamais été synonyme d’impunité nationale.

On ne peut pas confondre l’opportunisme et la vision.
On ne peut pas décorer ceux qui ont trahi sans demander réparation.

Les vrais bâtisseurs ne sont pas ceux qui se repositionnent à la veille d’un changement. Ce sont ceux qui ont tenu bon quand c’était dangereux. Qui ont dénoncé quand c’était impopulaire. Qui ont résisté quand c’était plus simple de courber l’échine.

Et maintenant, on fait quoi ?

La réponse d’Harold Leckat est claire : on reste éveillés. On refuse le recyclage politique. On se bat pour la mémoire collective.

Le 30 août 2023 ne doit pas devenir un mythe flou. C’était un cri, une claque, une ouverture. Si on laisse les mêmes revenir en douce, alors cette rupture ne sera qu’un mirage.

Nous n’avons pas fait tout ça pour remplacer un tee-shirt vert par un tee-shirt bleu.
Nous n’avons pas crié pour qu’on réécrive l’histoire à notre place.
Nous avons le droit d’espérer mieux, mais surtout le devoir de choisir mieux.

En 2025, on vote pour le changement. Le vrai. Pas celui qui s’achète en boutique politique.
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Trois semaines pour exister…

Vous déplorez — non sans raison — une scène devenue tristement banale : celle de citoyens agitant leur carte d’électeur comme une menace, au Trésor Public, dans l’espoir d’un rappel, d’un dû. Vous y voyez du chantage politique. Soit. Mais permettez-moi de poser la question autrement : que leur reste-t-il d’autre ?

Dans ce pays où les promesses sont recyclées à chaque échéance, où les routes sont construites au rythme des meetings, où les rappels tombent en cascade à la veille des urnes, qui peut encore croire que le pouvoir s’intéresse aux citoyens hors période électorale ? Pour nombre d’entre eux, le bulletin de vote est le dernier levier, le seul moment où ils peuvent espérer être entendus — ou redoutés.

Ces hommes et femmes n’ont pas choisi de politiser leur misère. C’est la politique elle-même qui a organisé leur précarité, qui a conditionné leurs espoirs à un cycle électoral. On ne troque pas sa voix contre un rappel par plaisir, on le fait parce que c’est souvent la seule monnaie de négociation dont on dispose dans un système verrouillé par ceux qui refusent de céder le pouvoir, même quand les urnes les désavouent.

Alors oui, le vote est un acte civique, une responsabilité. Mais dans une démocratie abîmée, ce même vote devient aussi, parfois, un cri. Un coup de poing sur la table. Une tentative — même maladroite — de reprendre un peu de pouvoir sur un quotidien qui échappe.

Ce n’est pas le peuple qu’il faut blâmer pour ses choix stratégiques, c’est le système qui rend ces stratégies nécessaires. Et parmi ces citoyens stratèges malgré eux, il y a un groupe en particulier dont on parle trop peu, sinon pour s’en moquer ou les réduire à des rôles folkloriques. Ce sont elles.

“Elles ne dansent pas pour le plaisir.”

À vous qui voyez dans certains comportements électoraux du chantage politique, avez-vous seulement regardé qui tient ces cartes d’électeur tendues comme des ultimatums ? Avez-vous écouté les voix derrière ces cris ? Ce ne sont pas des acteurs cyniques de la démocratie. Ce sont, bien souvent, des femmes. Des mères. Des survivantes.

Celles qu’on applaudit quand elles chantent et dansent au passage d’un cortège politique, mais qu’on oublie sitôt la sono éteinte.

Elles ont quitté l’école bien trop tôt. Grossesses précoces, manque de moyens, devoir de “faire leur part” imposé dès l’adolescence. Certaines subissent des violences financières silencieuses dans leur foyer. D’autres, mères célibataires, vivent de la vente de manioc, de piment ou d’aubergines sur les étals poussiéreux, sous un soleil qui ne fait crédit à personne.

Elles n’ont pas de syndicats. Pas de réseau. Pas de porte-voix. Elles n’ont que ce moment : la période électorale. Trois semaines pour se rappeler au bon souvenir d’un système qui les a reléguées aux marges. Trois semaines pour tenter de négocier, pas un avenir, mais un répit.

Et vous voudriez leur faire la morale ?

Non. Elles ne brandissent pas leur carte pour le plaisir. Elles ne chantent pas pour la gloire. Elles ne dansent pas parce qu’elles y croient encore. Elles dansent parce qu’il faut bien vivre. Parce que, dans cette mise en scène politique où elles ne sont jamais que figurantes, elles ont compris qu’un rôle de plus valait parfois un repas de plus.

Le véritable chantage, ce n’est pas celui qu’elles exerceraient sur les puissants. C’est celui que les puissants exercent sur elles depuis des décennies :
“Danse, soutiens, acclame… peut-être qu’on pensera à toi.”

Alors, à ceux qui dénoncent le “cancer démocratique” du vote intéressé, commencez par regarder la tumeur sociale qu’on laisse proliférer.
Et demandez-vous : qui sont les vrais marchands d’influence ?

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Révision des listes électorales : les Gabonais de l’étranger en attente, et le temps file !

Au Gabon, la révision des listes électorales a officiellement démarré le 2 janvier et doit s’achever le 31 janvier 2025. Mais pour les Gabonais résidant en France, c’est une autre histoire. Cinq jours après le lancement, l’ambassade du Gabon en France annonce enfin sur X (anciennement Twitter) que l’opération n’a toujours pas commencé. Résultat : frustration, incertitude et surtout, un sérieux retard à rattraper.

Une organisation qui laisse à désirer

Comment expliquer que l’opération, déjà annoncée depuis plus d’une semaine par le ministère de l’Intérieur, prenne du retard à l’étranger ? L’ambassade assure collaborer avec les autorités compétentes pour « finaliser les dispositions », mais en attendant, c’est la diaspora qui trinque. Chaque jour de retard, c’est un jour de moins pour s’inscrire ou mettre à jour ses informations. Et dans une campagne censée durer 30 jours, chaque jour compte.

Ce manque de réactivité pose une vraie question : nos autorités prennent-elles vraiment en compte l’importance du vote pour les Gabonais de l’étranger ? Ou bien est-ce qu’on considère, une fois de plus, que ceux qui sont loin peuvent attendre ? Peut-être aussi qu’on considère que nous sommes trop boudeurs donc mieux on ne vote pas ?.

Un tel retard, c’est pas seulement embêtant, c’est une véritable entrave au devoir citoyen. Beaucoup de Gabonais vivant en France ont des emplois du temps chargés et parfois des distances importantes à parcourir pour accéder aux centres d’enrôlement. Si la période d’inscription est raccourcie, certains risquent tout simplement de ne pas pouvoir s’enregistrer.

Ce qui est en jeu, c’est notre capacité, en tant que citoyens, à participer aux élections. Si on veut que tout le monde ait une chance de s’exprimer, il faut que des mesures soient prises dès maintenant :

Prolonger la période d’enrôlement en France ;
Renforcer la communication auprès des compatriotes ;
Et surtout, ouvrir rapidement les centres pour limiter les dégâts.

Préparez-vous malgré tout

En attendant que les choses bougent, on peut quand même se préparer. Pour éviter les mauvaises surprises le jour J, voici les documents à prévoir selon votre situation :

Pour les Gabonais d’origine : acte de naissance, jugement supplétif ou pièce d’identité valide (CNI ou passeport).

Pour ceux ayant acquis la nationalité : décret de nationalité, certificat d’authentification ou jugement de nationalité, et une pièce d’identité valide.

Pour les Gabonais nés à l’étranger : un acte de naissance délivré par une ambassade ou un acte transcrit à Libreville.

Si vous êtes déjà inscrit avec un Numéro d’Identification Personnel (NIP), il suffit de confirmer votre centre de vote. Les primo-électeurs ou ceux qui ont changé de résidence, eux, devront obligatoirement s’inscrire.

En conclusion : bougez-vous et poussez les autorités à agir

La révision des listes électorales n’est pas un détail : c’est un pilier de notre démocratie. Que vous soyez à Libreville ou à Paris, tout le monde doit avoir la chance de s’inscrire et de voter. Alors, en attendant que l’ambassade se réveille et que les centres ouvrent, préparez vos documents et soyez prêts à foncer.

Et pour nos autorités : il est encore temps de se rattraper. Mais faites vite, parce que la montre tourne, et le droit de vote, lui, n’attend pas.

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