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Projet Oligui Nguéma : Des promesses, en veux-tu ? En voilà !

Alors que le Gabon s’apprête à vivre une élection présidentielle historique, le projet de société du Général Brice Clotaire Oligui Nguema, porté par la transition post-coup d’État, se veut celui d’une renaissance nationale. Entre volonté de rupture avec l’ancien régime, réformes ambitieuses et réaffirmation de la souveraineté, que peut-on retenir de ce programme ?

Une volonté de refondation politique assumée

Les atouts d’un projet de rupture

Le projet s’inscrit dans une dynamique de refonte institutionnelle profonde. S’appuyant sur une transition militaire présentée comme un « coup de la libération », le candidat mise sur une refondation politique complète. Parmi les propositions phares figurent :

  • Une nouvelle Constitution, soumise à référendum, pour garantir des institutions renouvelées.
  • Un Code électoral repensé afin d’assurer la transparence des scrutins.
  • L’organisation d’un Dialogue national inclusif (DNI) pour reconstruire le contrat social et restaurer la confiance citoyenne.
  • Une décentralisation affirmée, avec un transfert de compétences vers les collectivités locales et un renforcement de la gouvernance territoriale.

Les limites d’un pouvoir toujours centralisé

Cependant, derrière cette volonté de réforme, le programme maintient une centralisation forte autour de l’exécutif. La conduite des réformes et les grands chantiers restent dans les mains de l’État central, soulevant des inquiétudes sur une possible dérive autoritaire, accentuée par le passé militaire du candidat. Par ailleurs, l’indépendance de la justice, bien que mentionnée, reste peu détaillée dans sa concrétisation institutionnelle.

Un projet économique ambitieux, mais à clarifier

Des initiatives fortes pour la souveraineté économique

Sur le plan financier, le projet affiche une volonté de maîtriser la dette publique, avec notamment le remboursement anticipé d’un eurobond. Il prévoit également le rachat d’actifs stratégiques, comme Assala Energy et la SNBG, pour renforcer la souveraineté sur les ressources naturelles. Parmi les mesures marquantes :

  • Création d’une Banque publique pour l’entrepreneuriat (BCEG) dotée d’un fonds de 20 milliards FCFA à destination des jeunes.
  • Recours accru aux Partenariats Public-Privé (PPP) pour financer les infrastructures (ports, routes, hôpitaux…).

Des flous budgétaires persistants

Malgré ces orientations, le coût global du programme n’est pas chiffré de manière détaillée. Les investissements annoncés – dans les infrastructures, l’agriculture, la digitalisation ou la défense – sont ambitieux, mais aucune projection pluriannuelle n’est fournie. Le risque d’une dépendance persistante aux recettes extractives (pétrole, mines) reste également élevé, malgré les intentions affichées de diversification économique.

Une vision sociale inclusive mais perfectible

Une ambition d’inclusion à large spectre

Sur le plan social, le projet affirme une orientation fortement inclusive, ciblant la jeunesse, les femmes, les personnes en situation de handicap, les retraités ou encore les populations marginalisées. Il prévoit :

  • Des investissements dans l’éducation et la santé (pôles hospitaliers, réhabilitation des écoles, retour des bourses).
  • Un soutien renforcé à l’emploi des jeunes (formation, alternance, soutien aux startups).
  • Une réforme des systèmes de protection sociale (CNSS, CNAMGS, CPPF).

Des objectifs sociaux encore flous

Cependant, plusieurs mesures phares manquent de précisions techniques : la promesse « Un Gabonais, un titre foncier » ou la réforme du logement social souffrent d’un manque de cadrage opérationnel. En outre, aucun indicateur d’impact social chiffré n’est présenté pour mesurer les progrès en matière de pauvreté, chômage ou inégalités. Enfin, le rôle très central de l’État dans tous les domaines laisse peu de place aux initiatives citoyennes ou privées.

Le projet d’Oligui Nguema se présente comme celui d’un changement en profondeur, porté par une transition exceptionnelle. Si les ambitions sont grandes et les chantiers multiples, la réussite dépendra de la capacité à concrétiser, chiffrer et équilibrer les pouvoirs, tout en impliquant durablement la société civile et les acteurs non étatiques.

Cependant, cette vision soulève aussi une interrogation de fond : le respect effectif des engagements. Depuis sa prise de pouvoir, plusieurs promesses formulées par le Général – notamment en matière de transparence, de réformes urgentes ou de calendrier de transition – ont été partiellement tenues ou repoussées. Cette tendance à l’ajustement en cours de route appelle à la vigilance et au suivi rigoureux de l’exécution de son programme. Au-delà des intentions affichées, c’est la cohérence entre le discours et l’action qui permettra de juger de la portée réelle de ce projet de société.

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Dr Iloko : un projet plein de rêves…

Faute de mécanismes concrets, de chiffrages précis et de stratégies réalistes, ce projet ressemble davantage à un rêve inspirant qu’à un véritable plan d’action gouvernemental.

1. Une ambition infrastructurelle impressionnante, mais irréaliste ?

Le projet du Dr Iloko prévoit la construction de 2000 salles de classes par an à l’échelle nationale. Cette ambition, bien qu’indéniablement louable dans l’optique de désengorger les établissements scolaires, soulève d’importantes interrogations quant à sa faisabilité. À titre de comparaison, le Complexe Scolaire d’Alibandeng, avec ses 45 classes pour 2000 élèves, servirait d’unité de mesure. Répliquer 45 fois ce modèle chaque année équivaudrait à une capacité annuelle supplémentaire de 90 000 places.
Cela représente une charge financière colossale. En prenant en compte qu’un établissement complet (pré-primaire, primaire, secondaire) peut coûter entre 2,5 et 5 milliards FCFA, le budget annuel pour atteindre cet objectif serait compris entre 112,5 et 225 milliards FCFA. À cela s’ajoutent les coûts de fonctionnement, de maintenance, de recrutement du personnel et de fourniture de matériel pédagogique. Peu d’éléments concrets dans le projet permettent de savoir comment ce financement serait sécurisé et soutenable dans la durée.

2. “Redonner la dignité aux enseignants” : un slogan vide de mesures concrètes

La promesse de « redonner la dignité aux enseignants » est répétée à plusieurs reprises dans le projet du Dr Iloko. Pourtant, aucune mesure précise n’est proposée pour traduire cette déclaration d’intention en actions concrètes. Le projet n’évoque ni revalorisation salariale, ni plan de formation continue, ni amélioration des conditions de travail, ni perspectives de développement professionnel.
Il en résulte une lacune flagrante dans la compréhension des défis que rencontrent les enseignants gabonais. Restaurer leur dignité ne peut se résumer à une proclamation : cela nécessite un engagement fort, structuré et mesurable, tant sur le plan matériel (traitement, équipements, sécurité) que symbolique (statut, reconnaissance sociale, perspectives d’évolution).

3. L’enseignement supérieur : entre grands chantiers et précipitation

La construction annoncée de 9 universités et 9 bibliothèques universitaires modernes, ainsi que de 2000 logements universitaires, montre une volonté claire d’expansion. Cependant, cette vision ne prend pas en compte les ressources humaines qualifiées nécessaires, la planification urbaine, ou encore les besoins logistiques d’un tel programme.
De plus, le système d’échanges internationaux soutenu par des allocations de 150 000 à 200 000 FCFA est séduisant, mais peu détaillé : Quels critères ? Quelle durée ? Quelle prise en charge réelle ? Ce volet semble davantage refléter une volonté d’attractivité qu’une stratégie pérenne pour améliorer la qualité globale de l’enseignement supérieur gabonais.

4. Un projet éducatif globalement déséquilibré

En somme, le volet éducatif du programme du Dr Iloko met l’accent sur la quantité plutôt que sur la qualité. Il propose un bond en avant en matière d’infrastructures, mais sans vision cohérente sur les moyens humains, pédagogiques et budgétaires nécessaires à leur mise en œuvre et à leur fonctionnement.


L’absence de priorisation, de phasage des projets, et de budget détaillé laisse planer le doute sur la viabilité de ces engagements. Or, un système éducatif performant repose avant tout sur la qualité de son encadrement, la formation des enseignants, la stabilité des ressources et la pertinence des programmes.

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CommunicationGabonPolitique

Journaliste ou animateur ? Une profession prise en otage au Gabon

Il est temps de regarder en face la crise profonde que traverse le journalisme gabonais. Alors que l’on croyait tourner une page après ce que certains ont appelé le « coup de libération », la réalité du paysage médiatique semble nous ramener aux pires travers d’avant.

Une profession instrumentalisée

Loin d’être un contre-pouvoir, le journalisme gabonais semble aujourd’hui instrumentalisé au service d’un narratif unique. Les médias ne sont plus que des relais d’informations officielles : ils publient ce que les institutions leur transmettent, sans analyse, sans explication, sans vérification. Le travail journalistique est réduit à une simple reproduction mécanique de communiqués.

Pire encore, on assiste à une diffusion à sens unique. Certains médias, avec la bienveillance silencieuse de la HAC, accordent une visibilité quasi exclusive à un seul candidat, à un seul discours. Le reste est mis sous silence, ou attaqué avec une virulence qu’on ne retrouve jamais lorsqu’il s’agit de commenter les actions du pouvoir.

Les soi-disant débats politiques deviennent alors de véritables mises en scène : plusieurs intervenants d’un même bord politique face à un seul contradicteur, souvent isolé, parfois même piégé. Peut-on encore parler d’équité de temps ou de pluralité d’opinion dans ces conditions ?

Cette complaisance envers le pouvoir, cette agressivité parfois gratuite envers l’opposition, décrédibilisent le métier. Le journalisme devient un outil, un prolongement des luttes politiques, et non un espace de compréhension, de nuance, d’investigation.

Quand le manque de compétence rencontre l’absence de volonté

À ce déséquilibre s’ajoute un problème tout aussi fondamental : le manque de préparation des journalistes. Face à des interlocuteurs rompus aux codes de la communication politique, les journalistes semblent souvent démunis. Ils ne maîtrisent pas les sujets, n’identifient pas les angles, n’imposent aucune rigueur dans les échanges.

L’interview récente de Billie Bi Nze en est l’exemple criant. Il a contrôlé l’entretien de bout en bout, répondant à sa guise, évitant sans difficulté les rares questions embarrassantes. Non pas grâce à un talent hors norme, mais surtout parce qu’en face, il n’y avait tout simplement pas de contradiction sérieuse.

Pour progresser, il faudra avoir l’honnêteté de reconnaître une forme d’incompétence, structurelle et installée. Ce n’est pas une attaque personnelle : c’est un constat nécessaire. Car ce n’est qu’en acceptant ses lacunes qu’on peut espérer les combler.

Mais là encore, la responsabilité ne repose pas uniquement sur les individus. Quel est le niveau de formation réel des journalistes ? Quels moyens leur donne-t-on pour enquêter, se documenter, se former ? Quel modèle économique leur permettrait d’être indépendants, au lieu d’être soumis aux logiques partisanes ?

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GabonOpinion

Fake it till you make it !

Nous observons actuellement une mobilisation croissante des agents des Forces l’ordre pour démanteler des réseaux de revente de drogues, de stupéfiants, etc. D’un autre côté, les adeptes des placements, ces femmes/filles dont les secrets étaient cachés autrefois, sont désormais connues. On sait, on voit, mais on ne parle pas seulement, chacun porte son gaz !

Tout ceci est louable, mais y’a un petit souci. Pourquoi personne ne se demande pourquoi beaucoup de jeunes trempent dans ces choses-là ? Ou on aime juste dire qu’on aime l’argent facile ?

Parce que beaucoup cherchent, beaucoup veulent travailler, mais où ?

Étant une femme, dans beaucoup de familles, quand tu as déjà le bac, et même souvent avant, tes parents estiment qu’ils ont assez fait, tu es livrée à toi-même !

Nous ne sommes pas en Europe. Il n’y a pas d’alternances, pas de job étudiant, pas de job saisonnier connu de tous. Partout c’est le piston !

Fake it till you make it.

C’est très souvent un mauvais conseil, mais je vais vous le donner aujourd’hui car ça marche pour moi. Je ne vous demande pas non plus d’être des Anna Delvey, mais sachez jouer vos cartes !

« Offre d’emploi : recherche assistante de direction sachant manier l’outil informatique. »
Postule !!! Si tu es retenue, tu vas dormir devant les tutos YouTube et tu apprendras !

« Tu sais saisir un document ? » Oui !!! Ensuite tu vas te documenter et essayer d’apprendre.

Y’a pas de boulot, donc on va tous mentir et apprendre sur le tas !

Il m’arrive que des clients me demandent d’élaborer un planning éditorial. Je suis community manager et non social media manager. Mais lorsqu’on me demande si je sais le faire, je dis oui, et toute la nuit je vais apprendre, poser des questions aux autres du domaine.
On ne peut plus se permettre de juste rester assis et attendre que la chance nous sourit, ça n’arrivera pas !

Tout le monde se bat pour avoir une place au soleil, tu n’es le Messi de personne pour que le soleil vienne à toi !

Néanmoins, une fois que vous avez trouvé une source de revenus, formez-vous ! C’est très bien d’apprendre sur le tas, mais se former, c’est toujours important. En plus, lorsque la formation est certifiante, ça vous donne plus de poids devant votre employeur.

Oser, se former et se bouger, c’est ce que nous devrions tous faire parce que personne ne le fera à notre place.

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GabonOpinionPrésidentielles2025Société

Et tout à coup, ils devinrent apolitiques

Il fut un temps, pas si lointain, où certains d’entre vous étaient des références en matière d’analyse politique. Rien n’échappait à votre œil aguerri : les décisions du gouvernement, les dérapages des membres du PDG, les comportements douteux des uns et des autres. Vous exigiez un pays nouveau, un pays juste, un pays où la morale guiderait enfin l’action publique. Vous étiez l’arme ultime contre l’hypocrisie et la compromission. Mais ça, c’était avant.

Aujourd’hui, vous êtes devenus amnésiques. Pire, vous êtes devenus apolitiques. Ce qui était une abomination hier est une « réalité complexe » aujourd’hui. Ce que vous combattiez avec ferveur est maintenant une “nuance” que vous expliquez avec des pirouettes linguistiques. Tout ça pourquoi ? Parce que, subitement, ce n’est plus l’ennemi qui agit ainsi, c’est votre ami, votre cousin, votre voisin, votre mentor.

Hier encore, vous étiez les hérauts de la transparence, de l’équité et de la déontologie. Vous scrutiez les moindres faits et gestes des politiques comme un professeur vérifiant une copie truffée de fautes. Mais aujourd’hui, quand les mêmes erreurs sont commises par vos proches, vous avez soudainement perdu la vue. Vous ne voyez plus rien, vous n’entendez plus rien, vous ne dites plus rien, vous ne tweetez plus rien.

Lorsque les partisans du PDG adoptaient une telle attitude envers leur leader, on les accusait de cultiver des comportements archaïques. Mais désormais, la complaisance a changé de camp, et les justifications pleuvent comme des feuilles mortes en saison sèche. Au final, respectons les choix politiques de chacun et ne cultivons pas la dictature de la pensée unique. Ils doivent bien rire de vous, ceux que vous critiquez autrefois.

Votre indignation était-elle sincère ou juste une posture ? Vos combats d’hier étaient-ils un engagement ou un prétexte pour mieux occuper le terrain politique jusqu’à ce que les vôtres soient en place ? Le changement que vous prêchiez, était-il un vrai projet ou juste un slogan de campagne ?

Le problème, ce n’est pas seulement que vous avez changé d’avis. C’est que vous devenez ce que vous dénonciez. À force de fermer les yeux sur les travers de votre camp, vous cautionnez ce que vous condamn(i)ez. À force de justifier l’injustifiable, vous transformez votre combat en comédie.

La vérité, c’est que si vous êtes honnêtes avec vous-mêmes, vous savez que vous avez trahi vos propres convictions. Mais il n’est jamais trop tard pour revenir à l’essentiel : ce n’était pas une question de personnes, mais de principes. Ce n’était pas une lutte contre un parti, mais contre un système. Ce n’était pas une question de qui est au pouvoir, mais de comment on l’exerce.

Alors, réveillez-vous. Rappelez-vous pourquoi vous vous êtes levés un matin avec la conviction qu’il fallait du changement. Ne laissez pas l’amitié, la parenté ou l’opportunisme détourner votre boussole morale. Parce que sinon, vous aurez juste été un de plus dans cette longue liste de militants saisonniers, ceux qui s’indignent un jour et se taisent le lendemain. Et franchement, le pays a déjà assez de girouettes comme ça, on devrait songer à investir dans l’énergie éolienne.

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La Révolte des Antilopes

Dans la vaste savane où régnait depuis des générations le vieux Lion Bongoloss, les antilopes vivaient sous le joug d’un règne sans pitié. Traquées, affamées, elles espéraient un jour voir tomber ce trône où seuls les fauves du clan Bongoloss avaient droit de régner.

Un jour, parmi elles, se levèrent de jeunes antilopes, fougueuses et pleines d’espoir. Elles parlèrent haut et fort, dénoncèrent les injustices et promirent qu’une fois le Lion chassé, la savane ne serait plus un lieu de peur mais un royaume de justice.

Les autres antilopes crurent en elles. Elles leur donnèrent leur confiance, leur courage et même leur voix, les poussant au sommet du rocher des chefs.

Et le vieux Lion tomba.

Mais à peine installées sur les hauteurs, ces jeunes antilopes changèrent. Leurs regards devinrent fuyants, leurs discours plus distants. Elles qui hier encore marchaient parmi leurs sœurs, ne daignaient même plus les voir.

Pire encore, elles s’entourèrent des hyènes qui hier les effrayaient tant. Elles festoyaient à leurs côtés, riaient avec elles, partageaient leur gibier.

Et lorsqu’une antilope osa leur rappeler leurs promesses, on l’accusa d’être naïve, de ne rien comprendre aux lois de la savane. On la tourna en dérision.

Regardez ces folles, ricanaient-elles depuis leur trône. Elles croient encore à la loyauté en politique !

Mais dans l’ombre des hautes herbes, les antilopes observaient. Elles n’étaient ni folles ni aveugles.

Elles voyaient bien que celles qu’elles avaient portées au sommet n’étaient plus des leurs. Elles n’étaient plus que des roitelets assis sur un pouvoir prêt à dévorer les leurs au moindre mot de travers.

Alors, les antilopes murmurèrent entre elles :

Nous les combattrons, tout comme nous avons combattu le vieux Lion.

Mais à une différence près : nous ne nous laisserons pas corrompre. Nous ne nous perdrons pas comme elles l’ont fait. Nous ne trahirons pas notre combat.

Et tandis que les hyènes et les nouvelles reines de la savane festoyaient sous la lueur de la lune, dans l’ombre, les antilopes se préparaient déjà.

Car une chose était sûre : rien ne dure éternellement dans la savane.

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Le Gabon et la culture du contentement : quand le “moindre mal” devient la norme

Il y a quelque chose qui m’agace profondément dans la société gabonaise : cette manie de se contenter du minimum. On a une si faible estime de nous-même que nous nous enthousiasmons pour la moindre avancée, le moindre geste, la moindre attention. Ok il faut célébrer les petites victoires, mais quand allons nous nous dépasser pour atteindre de vrais objectifs challengeants ?

Cette tendance est dans tous les domaines. Dans la politique, dans l’art, dans le sport, dans la gestion de l’Etat… On ne prend jamais exemple sur les meilleurs pour définir nos aspirations. On regarde nos pires échecs et on s’en sert comme baromètre pour mesurer nos succès qui ne le sont pas au final.

L’art de se satisfaire du peu : une habitude bien ancrée

Dans la politique, dans l’art, dans le sport, dans la vie professionnelle, et même dans les relations interpersonnelles, le contentement passif semble être devenu une valeur dominante. On ne cherche plus à s’inspirer des meilleurs, mais à s’éloigner juste assez de nos pires échecs pour s’auto-congratuler. Cette dynamique crée une société figée, qui confond stagnation et progrès véritable.

On doit élire un nouveau président ? Tant pis s’ il perpétue certaines pratiques douteuses du régime déchu, tant pis si il était le premier ministre hautain d’un ancien système malhonnête et corrompu… Au moins il a quand même fait çi ou ça, il a raison sur çi ou ça… On ne sait pas dire “non”. Parce que c’est quand même mieux qu’avant.

Et cette résignation ne touche pas que le domaine politique. Hein mesdames ? “Tous les hommes sont infidèles”, c’est rassurant de se le dire. C’est tellement plus facile d’être “au moins” la titulaire, que de chercher à viser haut en épousant un homme fidèle. Encore faudrait-il être conscient qu’on peut avoir mieux. On est fier d’un père pourvoyeur sans attache émotionnelle avec ses enfants. “Au moins il n’a pas nié la grossesse”, dit la jeune mère satisfaite d’être “au moins” féconde.

Le conformisme et la résignation, moteurs invisibles de la médiocrité

Entre conformisme, résignation, culture de la médiocrité, les concepts se choquent et s’entrechoquent pour donner le résultat médiocre auquel on a droit. On se satisfait et s’autocongratule en tant qu’intellectuel de donner une dimension de groove national à ce qui aurait pu faire de nous un exemple régional. Nous vivons dans un environnement où la médiocrité est non seulement tolérée, mais parfois valorisée comme preuve d’humilité ou de réalisme.

Quand tout le monde se contente de peu, personne ne vise haut. Ni nos dirigeants, ni nos institutions, ni même les citoyens. Pourquoi se dépasser quand le public ne le réclame pas ? La médiocrité ambiante a engendré un cercle vicieux : à force de n’attendre que le minimum, on décourage toute émulation vers le haut. L’initiative et le mérite sont trop peu valorisés. On voit des responsables accumuler honneurs et postes sans résultats tangibles, capitalisant sur un capital symbolique de titres ronflants plutôt que sur l’efficacité réelle. Un ministre d’une incompétence notoire est nommé à la présidence pour ne pas citer que ça.

Pas de principes forts : une société sans colonne vertébrale
Un autre symptôme de cette “culture” nauséabonde, c’est l’édulcoration progressive des principes. Les valeurs fondamentales ne tiennent plus lieu de repères. Le respect de la parole donnée, l’intégrité, la justice, la vérité — toutes ces notions sont devenues relatives, soumises aux circonstances, aux intérêts, ou au buzz du moment. On excuse tout, parce que “tout le monde le fait”. On tolère parce que “c’est comme ça”.

On admire l’opportunisme camouflé en pragmatisme. Il n’y a plus de socle moral solide. Et c’est peut-être là que le bât blesse le plus : sans principes clairs, on ne peut pas bâtir une société d’excellence. Et une société sans colonne vertébrale morale est une société qui s’effondre au moindre vent. C’est pourquoi la restauration des mentalités demeure une urgence.

Et si on osait l’excellence ?

“Au moins”, “quand même” sont devenus les slogans nationaux à la place du légendaire “on va encore faire comment?”. Ça nous aura pris plus de 60 ans pour faire ce pas de tortue. “Quand même”.

Je disais à un ami hier que je suis peut-être trop idéaliste. Cet environnement est un red flag géant pour nous autres qui rêvons grand, qui rêvons juste et qui rêvons d’excellence. A défaut de pouvoir transformer ce pays, j’espère semer la graine d’idéal chez vous mes dear lovers.

Et si vous êtes comme moi, peut-être qu’on contaminera un peu plus de monde. Ce serait le plus beau virus qui soit.

Allez, tchuss.
La P’tite Dame

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Êtes-vous sûrs que les choses vont changer au Gabon?

Moi, je n’y crois plus.

Il y a 20 ans, j’assistais à ma première campagne. Je n’avais pas encore l’âge de voter, mais j’observais curieusement l’effervescence autour de ces élections présidentielles de 2005, les “associations” qui se formaient pour réserver un “accueil chaleureux”, des hymnes à la gloire des valeureux candidats et ce en toutes les langues  du Gabon, les médias qui relayaient les meetings de chacun tout en valorisant grandement le principal candidat – OBO à l’époque.

4 ans plus tard alors qu’OBO nous quittait en 2009 et que l’intérim de Mme Rogombe se terminait, un scrutin électoral imprévu s’est organisé. A cette époque, j’étais en pleine adolescence. Je ne votais toujours pas mais la campagne était un vrai moment de “groove”.  Il y avait des rassemblements partout dans les quartiers pour “s’inscrire” dans des associations de circonstance. La course aux gadgets, aux tee-shirts et aux  billets de “2.000 frs” était lancée! 

En 2016, c’était une atmosphère différente. Je voyais comment les gens venaient frapper aux portes pour supplier de rejoindre leur associations ou mouvements pour en gros “faire le nombre”.  J’avais atteint l’âge légale de vote mais je ne votais pas (soucis administratifs). Avec des personnalités de la majorité devenues désormais opposantes et un nombre important de candidats le choix aurait été difficiles. Mais de toutes façons je ne pense pas que mon vote aurait été pris en compte vu la tournure après résultats.

2023 on a eu droit à la totale ! Des votants qui se déportaient, des promesses toujours plus grandes, mais aussi et surtout les réseaux sociaux qui étaient la source d’informations par excellence. En vérité on pouvait voir à quel point les gabonais avaient hâte de changements.  J’ai assisté à 2ou 3 discours de campagne via les réseaux sociaux (flemme!) J’ai voté pour la première fois et ma voix m’a été volée. La suite on l’a connait tous.

2 ans après on est encore là à devoir faire un choix sur qui sera notre président. Les candidats sont connus.  J’aurai aimé dire qu’après le régime Bongo c’est la seule élection durant laquelle je pourrai voter et être entendu mais … non. Je suis confuse et réticente. Les candidats en liste ne m’inspirent aucune confiance. Le candidat dit favori a décidé de pendre comme héritage la façon de faire de ses prédécesseurs. Payer les futurs votants, faire danser les foules, organiser des situations gênantes (grève de la faim, remise de dons financier d’étudiants au candidat, discours parsemé de louanges, etc.), c’est le même procédé qui se répète, la même formule magique pour “gagner”.

Au fil des années, les candidats changent mais à notre plus grand désarroi, le constat reste le même à chaque fois.

Les foules habillés à l’effigie des candidats remplissent les stades et autres endroits populaires, les baffles pestent de partout diffusant les sons de campagnes,  les foules écoutent religieusement le message du candidat présent. Un discours ponctué d’interjections du public comme pour valider les dires de l’homme politique. Après chaque meeting terminé et après le candidat parti, des files se forment automatiquement pour la distribution des billets.

Globalement, le processus en période de campagne électorale est resté le même. Au vu de ce constat, peut-on espérer que notre pays connaîtra un véritable changement un jour ?

Dans ce cas, ai-je vraiment l’obligation de voter ?

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Quand le pouvoir rabote l’expertise : compromis, économies et désastre pour les citoyens

L’expertise, lorsqu’elle est authentique, est censée garantir la qualité et la viabilité des décisions prises. Un ingénieur conçoit une route en intégrant des caniveaux pour éviter les inondations et l’érosion. Un économiste élabore un budget en tenant compte des réalités financières pour assurer la pérennité d’un projet.

Un expert en urbanisme propose des infrastructures adaptées aux besoins de la population. Mais dans un système où le pouvoir prime sur la compétence, ces considérations sont souvent sacrifiées sur l’autel des économies, des intérêts personnels et du désir de plaire.

Un phénomène récurrent dans la gestion publique est le rabotage des projets par les décideurs politiques. Un plan technique est validé, mais au moment de son exécution, des coupes budgétaires sont imposées sous prétexte de rationalisation des coûts. Là où l’expert aurait dû défendre l’intégrité de son travail, il se tait, ferme les yeux et accepte les compromis imposés par le sommet.

Le cas de la route sans caniveaux est un exemple parlant. L’ingénieur sait qu’en l’absence d’un système d’évacuation des eaux, les pluies finiront par endommager l’ouvrage. Mais le politique, soucieux d’économiser – et parfois d’empocher une part du budget –, décide que cette dépense est superflue. L’expert, au lieu d’expliquer que ce choix compromet la durabilité de l’infrastructure et mettra en danger les riverains, acquiesce. Il exécute, sachant pertinemment que quelques mois plus tard, les habitants subiront les conséquences de cette décision absurde.

Le même schéma se répète dans d’autres secteurs. Un économiste pourrait dénoncer une réforme budgétaire incohérente, mais il choisira de justifier l’impossible. Un expert en santé publique pourrait alerter sur des choix dangereux pour la population, mais il préfèrera éviter de contrarier le sommet. Le résultat est toujours le même : des décisions prises à l’aveugle, un travail bâclé, et un impact direct sur la vie des citoyens.

L’ironie de cette corruption de l’expertise, c’est que ceux qui acceptent ces compromissions en paient aussi le prix. L’ingénieur qui a validé une route mal conçue sera le premier pointé du doigt lorsque l’ouvrage s’effondrera. L’économiste qui a cautionné une mesure désastreuse sera jugé incompétent lorsque les caisses se videront. Il pourrait passer de génie économique à génie de la forêt.

Mais entre-temps, les décideurs, eux, auront déjà avancé à un autre poste, laissant derrière eux un champ de ruines et des experts devenus les boucs émissaires d’un système qu’ils n’ont pas osé affronter.

Cette soumission de l’expertise au pouvoir a un coût humain. Lorsqu’un pont s’écroule, ce sont des vies qui sont en jeu. Lorsqu’un budget est mal géré, c’est la population qui subit les conséquences économiques. Lorsqu’un hôpital est construit sans équipement adéquat, ce sont des malades qui meurent faute de soins adaptés. Derrière chaque compromis, chaque coupure budgétaire arbitraire, chaque renoncement à la rigueur, il y a des conséquences bien réelles pour le quotidien des citoyens.

Un expert qui accepte d’être une simple courroie de transmission du pouvoir ne trahit pas seulement sa profession, il trahit son propre rôle dans la société. Car au final, lui aussi vit dans ce pays, utilise ces infrastructures, dépend de ces services publics. Fermer les yeux aujourd’hui, c’est condamner tout un pays – et soi-même – à subir les erreurs de demain.

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Le cercle du pouvoir : les chuchoteurs, les pions et les revenants

La politique gabonaise est un théâtre où se jouent des drames bien connus, mais souvent mal compris. Si l’on se focalise sur le chef, on oublie qu’il n’est pas seul à la barre. Autour de lui, il y a ceux qui murmurent, ceux qui exécutent et ceux qui, après avoir été mis de côté, reviennent avec un discours révolutionnaire.

Les chuchoteurs : maîtres du jeu dans l’ombre

Derrière chaque décision présidentielle, il y a un cercle restreint d’individus qui influencent les orientations du pouvoir. Ce ne sont pas forcément des ministres ou des figures publiques, mais ce sont eux qui, en coulisses, tirent les ficelles. Ce sont eux qui soufflent des idées à l’oreille du chef, qui orientent ses choix, qui déterminent qui reste et qui saute.

Et personne ne les aime !

Pourquoi ? Parce qu’ils ne se battent pas pour le bien du pays, mais pour la préservation de leur propre influence. Leur devise : la fin justifie les moyens. Ils n’ont pas d’idéologie propre, si ce n’est celle qui leur permet de rester au sommet. Ce sont eux qui dressent le chef contre certains de ses alliés, qui manipulent les conflits internes pour garder la main. Et souvent, le chef finit par préférer leurs chuchotements aux cris du peuple.

Les pions jetables : loyaux, mais remplaçables

Ceux qui sont en première ligne du pouvoir, les ministres, les directeurs, les cadres du parti, ne sont en réalité que des pions. Ils reçoivent des ordres qu’ils ne contestent pas toujours, mais ils savent qu’ils ne sont pas intouchables. Leur destin dépend de l’humeur du chef et, surtout, des intérêts des chuchoteurs.

Dans l’histoire politique récente du Gabon, on a vu ces jeux d’influence mener à des tensions internes. Des figures qui pensaient être solidement ancrées dans le système ont été écartées sans ménagement. Certains, piqués dans leur orgueil, se sont alors transformés en opposants acharnés.

Les revenants : la revanche des frustrés

Le phénomène est récurrent. Ceux qui ont longtemps profité du système, mais qui ont fini par en être exclus, découvrent soudainement les vertus de la démocratie, de la transparence et du bien-être du peuple. Avant, ils étaient muets sur les abus du régime. Mais dès qu’ils perdent leurs privilèges, ils dénoncent l’injustice, l’autoritarisme et le clientélisme.

Beaucoup d’opposants ces dernières années ne sont en réalité que des exilés du pouvoir, frustrés d’avoir été mis de côté. Leur combat n’est pas toujours idéologique, mais souvent personnel : ils veulent récupérer leur place. C’est à ce moment-là qu’ils deviennent de fervents défenseurs du peuple et qu’ils veulent rompre avec l’ancien régime… auquel ils ont pourtant appartenu.

La responsabilité du chef : entre populisme et argent

Il serait injuste de ne blâmer que l’entourage. Le chef, lui aussi, a sa part de responsabilité.Ce qui a affaibli les dirigeants gabonais, ce n’est pas leur manque d’idées. Certains avaient même des ambitions réelles pour le pays. Mais à force d’écouter les mauvaises personnes, à force d’aimer les chuchotements plus que la vérité, ils ont perdu pied.

Ensuite, il y a l’attrait du populisme et de l’argent. Gouverner, ce n’est pas seulement plaire à la population en lançant des promesses grandiloquentes. C’est aussi prendre des décisions impopulaires, mais nécessaires. Beaucoup de chefs ont préféré les discours flatteurs aux réformes courageuses. Et c’est ainsi qu’ils se sont enfermés dans un cercle vicieux où l’argent et le pouvoir ont pris le pas sur le bien commun.

Un cycle sans fin ?

La politique gabonaise fonctionne comme une boucle. Les mêmes dynamiques se répètent : un chef s’entoure de chuchoteurs, écarte certains pions, voit des frustrés rejoindre l’opposition, puis finit par tomber à son tour.

Ce qui devait être un combat d’idées se transforme alors en une lutte d’influences, où l’objectif principal n’est pas d’améliorer le quotidien des citoyens, mais de contrôler les leviers du pouvoir. Pendant ce temps, le peuple, lui, reste spectateur d’un jeu qui ne change jamais vraiment les règles.

Mais est-ce une fatalité ? Faut-il accepter que la politique gabonaise soit condamnée à ce schéma immuable ? Rien n’est écrit d’avance. Si un jour l’intérêt collectif prend réellement le dessus sur les jeux d’ego et de pouvoir, alors peut-être que cette boucle pourra enfin être brisée. Mais pour cela, encore faut-il que ceux qui dirigent, comme ceux qui aspirent à diriger, aient le courage de choisir le peuple plutôt que leur propre survie politique.

Je te dis tout