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Quand on confond Dieu et les hommes

Je ne suis pas toujours d’accord avec les propos tenus par le Chocolat Des Filles. Sa manière de parler dérange, c’est vrai. Elle dérange surtout certaines élites, habituées à des codes plus feutrés. Mais sur les réseaux, cette forme populaire plaît. Elle parle au Gabonais lambda, celui qui vit les contradictions de notre société au quotidien, sans filtre, sans détour.

Mais ici, je veux surtout parler du fond.
Parce que sur le fond, il n’a pas tort.

Son message est clair : revenons à notre culture, à nos traditions, à nos valeurs.
Arrêtons de courir derrière des religions importées dont les représentants, chez nous, sont souvent des manipulateurs sans scrupules.

J’ai vu passer un post où un monsieur s’offusquait de ses vidéos.

« Il blasphème ! Comment ose-t-il parler ainsi de Dieu ? »

Mais vous êtes complètement à côté de la plaque, Monsieur.

Il ne parle pas de Dieu. Il parle des hommes.
Plus précisément de ces hommes d’Église qui pullulent dans nos quartiers, nos campagnes, nos écrans — et qui utilisent la foi comme outil de domination.
Ceux qui abusent de leur position pour extorquer, séduire, violer, mentir, tout en se drapant dans le silence des fidèles et la complicité passive des autorités.

Vos pasteurs, qui couchent avec des femmes mariées en détresse.
Vos prêtres, qui profitent de jeunes filles sans repères.
Parfois même, ce sont des garçons.
Et tout le monde sait. Et tout le monde se tait.

On a parfois l’impression que certains pasteurs et prêtres (je ne parle pas ici de l’islam, je ne connais pas assez) n’ont eu cette vocation que pour manipuler leurs ouailles. Rien d’autre.

Comment expliquer qu’une personne partie de rien devienne riche uniquement grâce à l’Église ?
Désolé, mais en bon catholique élevé dans l’idée qu’on doit souffrir pour mériter le Royaume, il y a quelque chose qui cloche.
On se croirait revenus au Moyen Âge, quand l’Église vendait des indulgences.
J’arrête là pour ne pas faire le parallèle de trop… Mais vous voyez bien où je veux en venir.

Miracle par ci, miracle par là.
Et ce sont toujours les mêmes “miraculés” d’une ville à l’autre. Un cirque bien rodé.
Et l’État dans tout ça ? Il regarde. Il laisse faire.

C’est précisément pour cela qu’on a besoin de voix comme celle du Chocolat des Filles.
Pour bousculer ces écosystèmes clos, devenus de véritables sectes, où l’on abrutit nos frères et nos sœurs sous couvert de foi.

Alors non, ce n’est pas de Dieu qu’il se moque.
C’est de ceux qui s’en servent pour se faire passer pour Lui.

Je te dis tout

ConteGabon

La Savane en Ordre

Dans le royaume de la Grande Savane, on venait tout juste de festoyer. L’intonisation du nouveau roi avait été un moment grandiose. On avait dansé, chanté, mangé jusqu’à plus soif. Tout le monde semblait heureux. Ou du moins, tout le monde faisait semblant.

Mais à peine les tambours rangés, le roi convoqua ses hyènes. “Il est temps de faire le ménage.” Les hyènes, toujours promptes à bien se faire voir, hochèrent la tête avec un zèle peu rassurant. Sans demander plus de précisions, ou peut-être en ayant très bien compris les sous-entendus, elles se mirent à quadriller la savane.

Leur mission ? Ranger. Leur méthode ? Chasser.

Ce sont d’abord les antilopes qu’on somma de déguerpir. Trop nombreuses, pas assez utiles, pas dans le bon coin. Certaines avaient pourtant grandi là. D’autres avaient même reçu autrefois l’autorisation des anciens rois de bâtir leur terrier près des baobabs. Mais l’époque avait changé.

Tu vis ici ? Et à quoi sers-tu exactement ?” lança une hyène en déchirant une paillote. Être antilope ne suffisait plus. Il fallait maintenant justifier son utilité dans la savane. Les plus lentes furent délogées sans autre forme de procès. Les plus rapides coururent, non pas pour survivre, mais pour sauver leur case, leur marmite, leur souvenir.

Pendant ce temps, les hyènes se servaient. Elles arrachaient les toitures, transportaient les pierres, prenaient le peu qu’il restait aux antilopes — tout en répétant que *“le roi l’a demandé”*. Et puisque le roi, du haut de sa termitière dorée, ne disait mot, chacun comprit qu’il consentait.

Le peuple se taisait.

Ou murmurait seulement.

Et dans le silence, une nouvelle règle s’imposa : ici, désormais, seuls les forts restent. Les autres, qu’ils déguerpissent.

Je te dis tout

EmploiGabon

Bonne fête du travail (fais ton travail)

Esclavagisés. Oui, c’est bien le mot. Dans bien des entreprises au Gabon, les travailleurs ne sont pas employés : ils sont tenus en laisse par des patrons qui ont « le bras long » à l’Inspection du travail. Le Code du travail ? Bafoué sans honte. Les droits des salariés ? Ignorés ou piétinés.

Et pendant ce temps, les travailleurs – souvent mal informés, souvent apeurés – acceptent les miettes qu’on leur tend. Pourquoi ? Parce que la peur est devenue une norme. Et que dans ce pays, la lâcheté s’exprime en une phrase devenue presque proverbiale : « On va encore faire comment ? »

Les employeurs, eux, s’en donnent à cœur joie. Faux bulletins de paie, manipulation d’horaires, magouilles administratives, intimidations en coulisses. Certains vont jusqu’à falsifier les fiches de salaires, font du trafic d’influence leur sport favori, mentent, trompent, et se croient au-dessus des lois. Intouchables. Inatteignables. Et toujours confortablement enrichis, pendant que leurs employés – ou devrions-nous dire leurs “employés-esclaves” – s’enfoncent dans la précarité.

Ce qu’on observe dans beaucoup d’entreprises au Gabon, c’est un enrichissement illicite masqué sous des titres ronflants de “direction”, “management”, ou “performance”. Une dynamique toxique qui empêche les Gabonais de vivre dignement, de s’occuper de leurs familles, de faire face à leurs responsabilités. Travailler, oui. Mais à quel prix ?

Alors il faut poser la question qui fâche : les travailleurs se sont-ils habitués à leurs chaînes ? Ont-ils fini par accepter l’inacceptable comme un destin ? Car tant que les autorités compétentes ne se pencheront pas, sincèrement et rigoureusement, sur cette réalité ; tant que les inspections du travail ne joueront pas leur rôle ; tant que les syndicalistes ne chercheront pas à entendre les deux versions – celle des employeurs et celle des employés – pour faire la lumière sur les abus, rien ne changera. On continuera à se souhaiter « bonne fête du travail » dans l’hypocrisie.

Alors oui : bonne fête du travail.
Mais surtout, fais ton travail.

Je te dis tout