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Polygamie, ton nom est débauche

Il y a quelques jours, j’ai échangé avec une personnalité médiatique et un podcasteur de renom sur les réseaux sociaux.
Au cours de notre conversation, la question de la polygamie et de l’inceste a surgi. Je déplorais que les femmes gabonaises contemporaines n’en parlent pas et que ce fléau endémique soit responsable de la « souffrance silencieuse » d’une grande partie des femmes gabonaises.

J’ai été stupéfaite d’apprendre qu’un podcasteur de renom avait qualifié la polygamie de « spirituelle » et s’en était tiré en affirmant que l’inceste était un sujet « sensible », alors inutile d’y réfléchir. J’ai été choquée, et je lui ai demandé : « En tant que femme, ne connaissez-vous pas le calvaire d’une autre femme victime de polygamie et d’inceste ? » Elle n’a pas répondu par la suite.

Le 24 mars 2025, le portail médiatique info241.com, via un article de Flacia Ibiatsi, a rapporté le viol odieux d’une jeune fille de 13 ans par un homme de 44 ans, vivant chez sa belle-famille. J’ai partagé l’article avec une figure médiatique influente et sollicité les réactions d’internautes actifs sur les réseaux sociaux. Personne n’a réagi. Personne n’était prêt à prendre conscience de ce crime abominable. Personne n’y a prêté attention. Comme si de rien n’était.

Sur les réseaux sociaux, de nombreux comptes font la promotion de la nudité, parfois déguisée, et du twerk, sous couvert de promotion de la culture africaine. Je leur demande : avez-vous vu des contenus similaires venant d’Asiatiques ou d’Occidentaux ? Pourquoi la femme africaine est-elle perçue comme un produit de consommation ? Car, désolée de le dire, la femme africaine est bel et bien considérée comme un produit par une grande partie des Africains. Le résultat est sous nos yeux.

Voilà la situation au Gabon. Un pays qui prétend vouloir prospérer, bien sûr grâce à l’argent emprunté et à l’aide de quelques capitalistes indiens et chinois.

Aucune société n’a jamais prospéré sans respecter ses femmes.

Le problème est profondément enraciné, car ces fléaux sont normalisés. Les hommes, sans distinction d’âge, se livrent à un adultère généralisé. Certains flirtent ouvertement avec des femmes de l’âge de leur fille. La débauche, parmi les hommes gabonais, est aussi naturelle que le sang dans les veines. La fidélité semble absente de leur code moral, s’il en existe un. Ce phénomène est généralisé, mais personne n’en parle, et encore moins ne le dénonce.

J’ai observé un autre phénomène : le nombre croissant de jeunes mères célibataires. Pourquoi ces mères sont-elles seules ? Où sont les pères de ces enfants ? Pourquoi les hommes gabonais ne prennent-ils pas leurs responsabilités ? Pourquoi abandonnent-ils la femme après l’avoir mise enceinte ? Après tout, il y a une différence entre les humains et les bêtes : nous ne vivons pas dans une jungle.

Ces questions sont simples, mais la société civile les ignore. Car les poser reviendrait à renoncer au privilège d’une vie de débauche, ce que peu sont prêts à faire.

Ces maux sociétaux s’épanouissent grâce à l’acceptation silencieuse. L’éthique sociale a sa part de responsabilité. Mais je n’en parlerai pas ici.

Pour comprendre ces dérives, il faut s’interroger : comment une société se construit-elle ? Comment a-t-elle évolué ? Je ne suis pas spécialiste de l’évolution sociétale au Gabon, mais mon expérience personnelle me pousse à m’exprimer. Je sais que ce sujet est tabou, et que peu y adhéreront, mais j’ose aborder l’inabordable.

En anglais, on dit : « Fools rush in where angels fear to tread. »
Je l’avoue. Je l’accepte.

La société gabonaise est figée, monolithique, fermé aux nouvelles idées. Les anciennes traditions persistent, sans ouverture au monde extérieur. La langue française, en dépit de la mondialisation, n’a pas suffi à ouvrir les esprits. Ainsi, même après la mondialisation, rien n’a changé. Durant la colonisation, les maîtres blancs exploitaient les Gabonais. Après l’indépendance, les élites locales ont continué sur le même schéma. À ceci près qu’on vote.

Dans les sociétés de consommation, la femme est aussi traitée comme un produit – mais dans un objectif de profit économique. En Afrique, cela détruit les fondations sociales. Ailleurs, les femmes sont protégées par la loi. En Afrique, non.

Le Gabon n’a pas encore atteint le niveau de maturité démocratique nécessaire pour voir émerger de vrais mouvements sociaux. Or, ce sont ces mouvements qui permettent de lutter contre les fléaux sociaux. Ce sont eux qui mobilisent l’opinion publique, sensibilisent, informent. Ce sont eux qui permettent l’adoption de lois protectrices. Et surtout, ce sont eux qui veillent à leur application. Les tribunaux doivent jouer leur rôle. La justice doit être dissuasive.

Mais tout cela suppose un consensus, même au sein de la société civile. Et c’est là le plus gros frein : tout le monde résiste au changement. Le statu quo arrange trop de gens. Pire encore, certains continueront à défendre l’inceste comme un droit, et la polygamie comme une expérience spirituelle.

Les esprits raisonnables doivent mener cette lutte difficile, abolir les inégalités, et faire naître une nouvelle société. Une société dans laquelle les femmes vivent en sécurité, où elles n’ont plus à se défendre seules face aux prédateurs humains.

Mais ce sera long. Très long. Et rien n’avancera si l’administration n’applique pas les lois, si les tribunaux ne punissent pas avec fermeté. Le changement durable nécessite volonté, rigueur et courage.

Je te dis tout

DroitsFemmesGabon

C’est le 8 mars, offrez nous des fleurs

Je crois qu’il est grand temps d’aller au-delà de la sacro-sainte phrase « ce n’est pas la fête des mères mais la journée internationale des DROITS des femmes » .

Le 8 mars, Journée internationale des droits de la femme, comme d’habitude, a été le temps pour celles qui travaillent de se faire un restaurant entre femmes de l’entreprise, écouter d’autres femmes parler de leurs problèmes de couple, des challenges qu’elles rencontrent en tant que femmes actives, remercier les dames (1ères et ex æquo ?) et autres femmes qui gravitent dans la sphère politique pour leur digne représentation de la femme gabonaise.

On a dit qu’on ne critique pas, alors, oui, ce n’est déjà pas mal. Il faut reconnaître que la femme gabonaise s’exprime, « elle a la bouche » comme on dit chez nous. Il faut reconnaître qu’il existe des textes, des textes qui depuis peu condamnent le harcèlement sexuel au travail (Messieurs, oui, nous savons que les chacalas existent aussi, mais ce n’est pas le sujet), des textes qui favorisent l’inclusion de la femme en société, des textes, décriés de toutes et tous, qui donnent à la femme, le statut de chef de famille au même titre que son conjoint.

Les textes existent, les marches et autres types de soutien aussi. Mais après, quel en est le bilan ?

J’ai envie de m’étendre sur le sujet, mais je ne suis même pas sûre que cela intéresse qui que ce soit. Je vais donc me contenter de jeter un pavé dans la mare et poser quelques questions :
Est-ce qu’on sait si les femmes, lorsqu’elles sont victimes d’agression sexuelle, connaissent leur droit et se sentent libres de porter plainte ? Lorsqu’elles le font, est-ce qu’on parle de la manière dont ces plaintes sont accueillies et de leur issue ?
Est-ce qu’on sait si les femmes souhaitent que l’on retouche, de manière plus approfondie (parce que cela a déjà été fait) le texte sur l’avortement ? Ne devrait-on pas lancer un débat de société quand on connaît la pratique récurrente du sac poubelle où l’on balance neuf mois de souffrance ? Est-ce qu’on évoque le jeu hypocrite des autorités qui savent bien qu’on pratique des avortements clandestins, à tout coin de rue et même dans les cliniques les plus honorables de la capitale ?
Est-ce qu’on se demande comment une femme salariée du privé vit durant ses trois mois de congé maternité, privée de son salaire parce que la CNSS doit prendre le relais ? Cette même CNSS dont le remboursement pourrait contribuer aux frais d’université de l’enfant, tant il arrive tard.
Est-ce qu’on se demande si la tradition du père qui fait épouser ses enfants et les enterre n’est pas un peu déplacée (le mot est doux) dans un monde où la femme battante (qui se débrouille seule face à son ex-amant démissionnaire) a été érigée en norme ?
Enfin, de manière générale, est-ce qu’il ne serait pas judicieux de se dire que notre société matriarcale sur fond d’empreinte coloniale est souffrante, en perte de repères, et que peut-être, en écoutant les maux de Vénus, nous parviendrons à créer une meilleure Terre gabonaise pour tous ?

Le 8 mars n’est pas une journée de fête, c’est un jour qui, dans un pays en construction, doit faire mal, doit réveiller les souffrances endormies, bousculer les hypocrisies entendues et chercher des solutions réelles.

Pensons-y en offrant et en acceptant les fleurs.

Je te dis tout