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Réserver certains métiers aux Gabonais : entre ambition et réalités du terrain

La décision du Conseil de réserver certains métiers aux nationaux, y compris dans des secteurs émergents comme le commerce numérique et l’entrepreneuriat moderne, s’inscrit dans une volonté de renforcer la souveraineté économique et de donner plus de place aux jeunes Gabonais. Sur le papier, cette mesure vise à créer de nouvelles opportunités et à protéger l’économie locale.

Cependant, sa réussite dépendra de plusieurs facteurs souvent négligés.

D’abord, exercer ces métiers implique une organisation quotidienne exigeante : ouverture tôt le matin, tenue d’une comptabilité rigoureuse, gestion des charges, etc. Ce sont des compétences qui nécessitent un véritable accompagnement et parfois même une rééducation aux réalités de la gestion d’entreprise, loin de l’idée de « compter sur un soutien extérieur » à la fin du mois.

Ensuite, il faut anticiper les risques de contournement. Sans un encadrement précis, certains pourraient se limiter à prêter leur nom ou leur statut de national pour qu’un étranger gère l’activité, contre une rétribution.

Cela pourrait transformer la mesure en un simple business parallèle, où le propriétaire officiel ne serait qu’un garant rémunéré.

La question du contrôle est également centrale. Faut-il exiger que le gérant soit Gabonais ? Comment vérifier que la loi est respectée sans tomber dans des pratiques abusives ou du harcèlement administratif ? Une surveillance mal pensée pourrait décourager les entrepreneurs au lieu de les soutenir.

Pour que cette réforme produise les effets escomptés, il faudra donc :

Préciser les critères légaux (propriétaire, gérant, actionnaire majoritaire, etc.) • Mettre en place des contrôles clairs et proportionnés

Former et accompagner les entrepreneurs pour qu’ils soient réellement opérationnels

Prévoir des dispositifs de financement et d’appui technique pour favoriser la pérennité des entreprises

Réserver des métiers aux Gabonais peut être une avancée, mais seulement si l’application est pensée pour éviter les dérives et maximiser l’impact positif sur l’autonomie économique du pays.

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Dr Iloko : un projet plein de rêves…

Faute de mécanismes concrets, de chiffrages précis et de stratégies réalistes, ce projet ressemble davantage à un rêve inspirant qu’à un véritable plan d’action gouvernemental.

1. Une ambition infrastructurelle impressionnante, mais irréaliste ?

Le projet du Dr Iloko prévoit la construction de 2000 salles de classes par an à l’échelle nationale. Cette ambition, bien qu’indéniablement louable dans l’optique de désengorger les établissements scolaires, soulève d’importantes interrogations quant à sa faisabilité. À titre de comparaison, le Complexe Scolaire d’Alibandeng, avec ses 45 classes pour 2000 élèves, servirait d’unité de mesure. Répliquer 45 fois ce modèle chaque année équivaudrait à une capacité annuelle supplémentaire de 90 000 places.
Cela représente une charge financière colossale. En prenant en compte qu’un établissement complet (pré-primaire, primaire, secondaire) peut coûter entre 2,5 et 5 milliards FCFA, le budget annuel pour atteindre cet objectif serait compris entre 112,5 et 225 milliards FCFA. À cela s’ajoutent les coûts de fonctionnement, de maintenance, de recrutement du personnel et de fourniture de matériel pédagogique. Peu d’éléments concrets dans le projet permettent de savoir comment ce financement serait sécurisé et soutenable dans la durée.

2. “Redonner la dignité aux enseignants” : un slogan vide de mesures concrètes

La promesse de « redonner la dignité aux enseignants » est répétée à plusieurs reprises dans le projet du Dr Iloko. Pourtant, aucune mesure précise n’est proposée pour traduire cette déclaration d’intention en actions concrètes. Le projet n’évoque ni revalorisation salariale, ni plan de formation continue, ni amélioration des conditions de travail, ni perspectives de développement professionnel.
Il en résulte une lacune flagrante dans la compréhension des défis que rencontrent les enseignants gabonais. Restaurer leur dignité ne peut se résumer à une proclamation : cela nécessite un engagement fort, structuré et mesurable, tant sur le plan matériel (traitement, équipements, sécurité) que symbolique (statut, reconnaissance sociale, perspectives d’évolution).

3. L’enseignement supérieur : entre grands chantiers et précipitation

La construction annoncée de 9 universités et 9 bibliothèques universitaires modernes, ainsi que de 2000 logements universitaires, montre une volonté claire d’expansion. Cependant, cette vision ne prend pas en compte les ressources humaines qualifiées nécessaires, la planification urbaine, ou encore les besoins logistiques d’un tel programme.
De plus, le système d’échanges internationaux soutenu par des allocations de 150 000 à 200 000 FCFA est séduisant, mais peu détaillé : Quels critères ? Quelle durée ? Quelle prise en charge réelle ? Ce volet semble davantage refléter une volonté d’attractivité qu’une stratégie pérenne pour améliorer la qualité globale de l’enseignement supérieur gabonais.

4. Un projet éducatif globalement déséquilibré

En somme, le volet éducatif du programme du Dr Iloko met l’accent sur la quantité plutôt que sur la qualité. Il propose un bond en avant en matière d’infrastructures, mais sans vision cohérente sur les moyens humains, pédagogiques et budgétaires nécessaires à leur mise en œuvre et à leur fonctionnement.


L’absence de priorisation, de phasage des projets, et de budget détaillé laisse planer le doute sur la viabilité de ces engagements. Or, un système éducatif performant repose avant tout sur la qualité de son encadrement, la formation des enseignants, la stabilité des ressources et la pertinence des programmes.

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