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Drogue, jeunesse et responsabilités : le Gabon face à une urgence silencieuse

Ces dernières années, le fléau de la drogue a explosé dans les rues du Gabon. Des quartiers populaires aux établissements scolaires, des ruelles de Libreville aux villes de l’intérieur, les témoignages s’accumulent, les alertes se multiplient… mais bien souvent, l’État détourne le regard.

Les jeunes gabonais, confrontés à un chômage structurel, à l’ennui, au désespoir ou à la pression sociale, deviennent les premières victimes d’un marché parallèle de plus en plus agressif. Chanvre, kobolos, caillou, lean… la liste s’allonge. Et derrière chaque addiction, c’est une vie qui vacille, une famille qui s’effondre, une génération qu’on abandonne.

Les Premières Dames à la rescousse : une tradition de solidarité

Il faut le reconnaître : certaines Premières Dames ont tenté, à leur manière, d’agir là où l’appareil d’État traînait la patte. On se souvient encore de l’association Horizons Nouveaux, fondée par Edith Lucie Bongo, qui travaillait déjà avec des jeunes en détresse et portait un regard particulier sur les plus fragiles.

Aujourd’hui, une nouvelle figure s’impose dans la continuité de cet engagement : Zita Oligui Nguema, actuelle Première Dame du Gabon. À travers sa structure, la Fondation Ma Bannière, elle s’empare du sujet avec une initiative inédite : la construction du tout premier centre de désintoxication pour jeunes au Gabon.

Une bannière d’espoir

Lancé ce 5 août 2025, ce projet marque un tournant. 200 jeunes par an pourront bénéficier de soins, de formations et d’un accompagnement à la réinsertion. Le centre ne se contente pas de soigner, il répare. Il ne juge pas, il tend la main.
C’est tout ce qu’on pouvait attendre d’un État moderne… et c’est la Première Dame qui l’apporte.

Il serait injuste de ne pas saluer ce geste, même si on peut regretter qu’il ne vienne pas directement du ministère de la Santé ou de celui des Affaires sociales. Mais en attendant, c’est une réponse concrète dans un désert d’inaction politique.

Il est temps d’agir. Vraiment.

Ce centre n’est pas une fin en soi. C’est un début, une alerte, un signal. Car la drogue n’attend pas. Elle n’a pas de patience. Elle ronge les esprits, les corps, les ambitions, les avenirs.
Si nous ne faisons rien, elle continuera de ravager nos enfants, nos quartiers, notre société.

L’urgence est réelle.
Le silence est complice.
Le combat ne doit pas être porté par une seule Fondation, mais par toute une nation.

À la jeunesse, il faut offrir des perspectives, des lieux d’écoute, des alternatives.
Et à ceux qui osent encore croire, encore bâtir, encore s’engager, comme la Fondation Ma Bannière, il faut dire : merci… et continuez.

Je te dis tout

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Boutcho, des braises à l’impasse : quand la réinsertion se heurte aux interdits

Connu de tous dans le quartier pour un passé tumultueux, Boutcho a longtemps arpenté les rues, un couteau à la main, menaçant les passants. Son casier judiciaire, aussi long que les jambes de Wemby, témoignait d’une vie rythmée par la délinquance. Pourtant, Boutcho a choisi de se repentir. Loin des agressions, il a troqué son couteau de bandit contre un ustensile de boucher, se lançant avec fierté dans la vente de “pain au poulet” et de brochettes de cotis braisés.

Ce commerce de rue, florissant depuis plusieurs mois, n’était pas seulement une source de revenu digne pour Boutcho ; il était aussi devenu un symbole de sécurité dans le quartier, sa présence apaisant les passants et refroidissait les “petits brigands” de la zone sur lesquels il conservait une certaine influence.

La décision subite du Super délégué de Libreville d’interdire la streetFood à partir du 4 juillet 2025, pour des raisons d’hygiène et de salubrité publique, jette une ombre d’incertitude sur l’avenir de nombreux Gabonais dont Boutcho.

L’annonce de l’interdiction de son commerce est un véritable coup de massue. Sans préavis, cette mesure drastique, motivée par une pseudo nécessité d’améliorer l’hygiène et la salubrité publique, menace directement le gagne-pain de dizaines, voire de centaines de personnes vivant à Libreville. Pour Boutcho, dont le niveau scolaire ne permet pas une réorientation facile et dont la fierté lui interdit un retour sur les bancs de l’école, cette décision sonne comme une impasse.

La situation de Boutcho n’est malheureusement pas isolée. Au Gabon, nombreux sont ceux qui, en attente d’un “miracle” de la fonction publique ou d’un appel d’une entreprise privée, se sont tournés vers la street food comme unique moyen de subsistance. Que vont devenir ces travailleurs informels ?

Le désespoir pourrait-il le pousser à renoncer à sa réinsertion et à retourner dans la rue pour agresser les gens, annulant des années d’efforts ?
L’État a-t-il prévu des mesures d’accompagnement pour ces personnes qui se retrouvent du jour au lendemain sans revenu ? L’absence apparente de solutions de reconversion, d’aides ou de cadres légaux pour formaliser et assainir ces commerces laisse un vide inquiétant.

Si l’hygiène et la salubrité sont des préoccupations légitimes, la brutalité de cette décision sans préavis interroge sur les motivations profondes. S’agit-il d’une volonté de moderniser l’image de la capitale, d’une réponse à des pressions foncières, d’un acte purement xénophobe (une bonne partie de ce business est pratiquée par des ressortissants étrangers) ou simplement d’un manque de moyens pour encadrer plutôt qu’interdire ? Une chose est certaine : en coupant ainsi les ponts avec l’économie informelle sans proposer de voie de sortie, les autorités risquent de créer une crise sociale majeure, allant à l’encontre des objectifs de développement et de cohésion sociale.

La situation de Boutcho et de ses pairs met en lumière l’urgence d’une approche plus nuancée, où la régulation et l’accompagnement remplacent l’interdiction pure et simple, garantissant ainsi la dignité et la survie de ceux qui, malgré les obstacles, tentent de gagner honnêtement leur vie.

Je te dis tout